L’enquête semble mettre en cause la conductrice du car scolaire percuté par un TER à Millas, dans les Pyrénées-Orientales, en décembre dernier. Plusieurs témoins ainsi que des élèves ont indiqué que les barrières étaient fermées. Mais l’essentiel est dans ce détail : la conductrice venait de recevoir un SMS…

Un SMS annoncé par une sonnerie, une vibration, désormais intégrées à la vie quotidienne. Un signal discret mais aussi puissant qu’une décharge électrique. Nous sommes devenus esclaves de nos portables, de nos bracelets électroniques. Ce n’est pas un appel, c’est un impératif. On ne peut attendre, c’est une convocation. Un SMS qui peut jeter un trouble. Vous savez, ce moment curieux où nos yeux sont ouverts mais ne voient plus, où le regard est vide et « la tête est ailleurs ». Qui m’appelle ? Qui me veut ? On me cherche, j’existe. Troublée. Par quoi ? Un enfant malade, un vieux parent qui vient de tomber, une rupture amoureuse ? Ou alors, simplement : tu veux quoi à midi, gnocchis ou spaghettis ? Bref, des messages qui ne peuvent pas attendre. Le seul choix, c’est tout de suite ou maintenant. Avec le risque de ne pas voir une barrière baissée.

La dictature de l’instantané. Jadis, Colbert reboisait Tronçais pour donner des chênes à la marine française. Dans le monde rural, on plantait des truffières pour ses vieux jours, on lorgnait les terres du voisin, les parents arrangeaient des mariages pour unir les terres des deux familles, on inscrivait ses projets dans une temporalité. Si ce n’est pas le fils, le petit-fils le fera. Il fallait du temps pour que les choses s’accomplissent, mais ce temps était accepté. L’échelle de temps pour ces transmissions était le temps long. On est passé du demi-siècle à la demi-seconde. C’était un autre temps. On peut même se demander si ce n’était pas une autre planète.