Au départ, Béatrice et Jean-Yves Briand projetaient juste de déblayer l’ancienne porcherie salle de traite pour en faire une grande salle de jeux pour leurs trois enfants. Avec des murs de pierre du XVIIIe siècle et un toit en bon état - en tuiles rouges que le précédent propriétaire avait rapportées de Loire-Atlantique -, le bâtiment a du charme. Tant et si bien que leur conseiller du centre de gestion leur a soufflé l’idée d’en faire une salle des fêtes destinée à la location. Dans leur secteur, à 40 km de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) et de Vannes (Morbihan), l’offre en salles est faible. Les 135 m² pourraient accueillir des tables et des chaises pour cent personnes.

Parcours du combattant

Le couple se jette à l’eau. « Je ne veux pas quitter mon activité avec des regrets », lance Béatrice. Alors elle convoque les artisans, compare les devis pour agrandir les ouvertures, se renseigne sur les normes pour la réception du public. Une cuisine contiguë avec tous les équipements et de la vaisselle faciliteront l’organisation de réceptions. Et le couple prévoit un petit « plus », une sono et un vidéoprojecteur pour les fêtes de mariage, les anniversaires…

C’est un projet nouveau, chronophage, mais enthousiasmant. Et de loin plus agréable que la bataille réglementaire que la famille a dû mener avant d’obtenir l’autorisation de faire les travaux. « Ça a été un vrai parcours du combattant, soupire Béatrice, avant d’énumérer les quatre demandes de permis de construire déposées entre 2015 et 2017. Il fallait être motivé. » Le sésame en poche, le chantier commence. Il faudra presqu’un an pour terminer la salle et installer un dortoir de onze couchages à l’étage. Le couple s’en sort pour 70 000 euros. En octobre 2018 tout est enfin prêt. Béatrice fait de la publicité pour la « Salle des chênes » sur Facebook. Ses enfants l’aident à créer un site internet. Elle conçoit aussi un profil d’établissement sur « Google My Business » afin d’être davantage visible sur la toile.

Succès inattendu

Béatrice grapille du temps pour faire son étude de marché, fixer ses tarifs, et gérer les réservations par téléphone, tout en assurant sa part de travail à la ferme, avec la traite matin et soir des cent vaches. Et ça marche ! « Sur les dix premiers mois d’activité, il n’y a eu que deux mois creux, de mi-janvier à mi-mars, se réjouit-elle, encore un peu étonnée de ce succès. J’ai des demandes des gens du secteur et d’autres font plus de 100 km car la salle dispose d’un dortoir. Il y a tous les âges. Ils viennent pour des anniversaires, des fêtes de famille ou des réceptions de mariage. » Chaque week-end, quatre-vingt personnes, en moyenne, débarquent sur l’exploitation et investissent le grand parking gravillonné attenant. « Nous habitons un hameau, mais beaucoup de monde défile chez nous, se réjouit Béatrice. Nous faisons de belles rencontres. »

Règlement intérieur

Il y a toutefois aussi eu de moins bonnes surprises, avoue-t-elle : « Tout le monde n’a pas la même conception du ménage bien fait, du respect des horaires, ou du bruit pendant la nuit… » À chaque fois, le couple s’adapte : « Nous sommes devenus plus stricts. Maintenant, nous clarifions toutes les consignes dans un règlement intérieur que nous faisons signer à l’arrivée. » Le forfait ménage est désormais intégré dans le tarif de base. Les espaces dédiés aux locataires sont bien délimités : « Certains n’hésitaient pas à aller dans notre jardin ou à fouiner dans les bâtiments d’élevage », se souvient Jean-Yves.

Forts de l’expérience acquise, les Briand ont revu leurs tarifs : 300 euros pour la journée, 780 euros du samedi matin au dimanche soir, et un forfait de trois jours à 1 000 euros pour les mariages.

Les demandes continuent d’arriver : déjà dix futurs mariés ont réservé la salle pour 2020. D’ailleurs, beaucoup aimeraient loger sur place… Il n’en fallait pas plus pour relancer les deux éleveurs sur un nouveau projet.

En face de la salle, un vieux bâtiment agricole, au toit et aux murs de pierre en bon état, pourrait parfaitement être transformé en un gîte de grande capacité. Le conseiller en tourisme de la chambre du commerce les y encourage. Avec l’architecte, ils dessinent les plans de sept chambres pour quatorze à vingt personnes, cinq salles de bains, deux cuisines. Béatrice aimerait ajouter un spa pour se différencier. Après des mois de travail et plusieurs devis, le couple vient de ficeler son projet de rénovation pour un peu moins de 200 000 euros. Il ne reste plus qu’à obtenir l’accord de la banque pour démarrer les travaux à la rentrée et ouvrir le gîte à l’automne 2020.Sophie Bergot