Emmanuelle Lemaitre, éleveuse d’ovins à Héronchelles en Seine-Maritime, ne s’attendait pas à une telle réaction. Son projet d’agrivoltaïsme sur cinq hectares a motivé une visite d’Hervé Morin, président de Région Normandie, sur sa commune le 12 janvier 2024. Hervé Morin y a ainsi déclaré : « J’attaquerai auprès du tribunal administratif tous les projets qui seront autorisés en Normandie ».
Un projet « pour recentrer mon activité sur la ferme et financer sa restauration »
À la tête de près de 300 brebis sur 40 hectares, l’éleveuse est installée depuis 2020 sur l’exploitation familiale en complément d’un commerce. Emmanuelle Lemaitre affirme : « Je cherche à diversifier mes sources de revenus pour recentrer mon activité sur la ferme et financer la restauration de celle-ci. » Avec le projet dont elle attend la modélisation, une prairie de fauche pourrait être équipée de 8 775 panneaux solaires sur 5,2 hectares de coteau à partir de 2026.
Dans le cadre d’un contrat de 20 ans dont elle partagera la redevance de 3 000 euros par hectare avec sa mère propriétaire, les panneaux fixes inclinés couvriraient la moitié de la surface de la parcelle. Elle souligne que « le système proposé par H2air ne dévalorise pas ma parcelle grâce à des pieux enfoncés dans la terre sans être bétonnés ».
Préserver le potentiel agricole
Pourquoi Hervé Morin a-t-il choisi ce projet ? « Je m’oppose à tout projet agrivoltaique, ici comme ailleurs, du fait d’enjeux régionaux gigantesques », a-t-il lancé sur place. Le président de Région se dit préoccupé par la préservation du potentiel agricole et des emplois dans l’agroalimentaire qui en découlent.
Il juge que l’énergie solaire doit prioritairement être captée sur des surfaces déjà artificialisées. Il a enfoncé le clou en affirmant que l’agrivoltaïsme générera une rente qui freinera l’installation. Enfin, il souhaite que le développement soit reporté après l’évaluation des trois expérimentations autorisées en Normandie.
De son côté, le maire d’Héronchelles, commune de 148 habitants, craint de voir les panneaux se multiplier sur sa commune au détriment du cadre de vie. « Nous voulons rester un village de campagne », a clamé Jean-Luc Poyen.