Dans le cadre du programme national de biosurveillance, Santé publique France a publié le jeudi 16 décembre 2021 un nouveau volet de l’étude Esteban (1) mesurant notamment les niveaux d’exposition à cinq familles de pesticides ainsi qu’aux PCB, dioxines et furanes, présents dans de nombreuses sources environnementales et alimentaires.

« Si globalement l’imprégnation de la population est en baisse, certaines substances pourtant interdites aujourd’hui conduisent encore à des expositions non négligeables. »

Étude Esteban

Des niveaux similaires à ceux mesurés en Europe

Pour la première fois, Santé publique France a pu décrire l’exposition à cinq familles de pesticides dosés dans les urines chez les enfants et l’exposition à certains organochlorés spécifiques, organophosphorés spécifiques, carbamates et herbicides chez les adultes vivant en France métropolitaine en2014-2016.

 

Les principales conclusions des travaux montrent que :

 

  • Les niveaux mesurés sont en diminution par rapport à l’étude ENNS (Étude nationale nutrition santé) en 2006-2007 chez les adultes sauf pour le métabolite de la deltaméthrine (Br2CA) ;
  • Les niveaux mesurés en France sont similaires à ceux retrouvés dans la plupart des pays étrangers (Europe et Amérique du Nord) sauf pour le β-HCH, le métabolite des organophosphorés (DMTP) et le Br2CA pour lesquels les concentrations mesurées en France sont plus élevées ;
  • Les niveaux d’exposition sont variables en fonction des substances : les adultes sont exposés notamment à certains organochlorés, au métabolite des organophosphorés (DMTP), aux pyréthrinoïdes. Les enfants sont exposés au DMTP et aux pyréthrinoïdes ;
  • Certaines expositions à des substances aujourd’hui interdites concernent une part non négligeable de la population (exemple : le lindane est quantifié chez presque 50 % de la population des adultes ou des enfants) ;
  • Le glyphosate est quantifié chez moins de 20 % des adultes ou des enfants.

Des facteurs d’exposition variés

Cette étude a également permis d’identifier les facteurs qui influencent les niveaux d’imprégnation mesurés dans la population. Les résultats montrent une diversité des facteurs identifiés.

 

Ainsi, pour certaines substances, l’alimentation augmente les imprégnations notamment aux organochlorés chez les personnes consommant des œufs ou des matières grasses ; aux pyréthrinoïdes chez les consommateurs de viande bovine ou de produits animaux autoproduits.

 

En revanche il ressort que « la consommation de produits issus de l’agriculture biologique diminue, celles en organochlorés, en DMTP (métabolite des organophosphorés), et en pyréthrinoïdes. »

 

« On observe également l’impact de certains comportements et de l’environnement pour les concentrations en pyréthrinoïdes qui augmentent avec la consommation de tabac ; et l’utilisation d’insecticides domestiques à savoir les antiparasitaires sur les animaux domestiques, ceux contre les acariens et ceux contre les insectes volants », ajoute encore l’étude.

 

« Afin de diminuer certaines concentrations, nos résultats suggèrent d’adopter une consommation alimentaire variée intégrant des produits de l’agriculture biologique. Mais également de respecter les conditions d’utilisation des insecticides au domicile et d’aérer régulièrement son intérieur », explique Clémence Fillol, responsable de l’unité de surveillance des expositions à Santé publique France.

Valeurs de référence pour un meilleur suivi

Les résultats ont permis d’établir des valeurs de référence d’exposition, pour les organochlorés, les métabolites des organophosphorés, le glyphosate et son métabolite l’AMPA, l’acide 2,4-dichlorophénoxyacétique (2,4-D), les pyréthrinoïdes et les PCB/dioxines/furanes à partir de la méthode publiée par Santé publique France. Ces valeurs de références permettent de déterminer si une population spécifique est plus exposée à une substance donnée et à un moment donné que l’ensemble de la population.

 

Les résultats montrent d’ailleurs un impact de la réglementation pour les substances réglementées comme les organochlorés, les organophosphorés dont les usages ont été interdits en France pour certaines depuis plusieurs dizaines d’années. En effet, les niveaux d’imprégnation sont en diminution chez les adultes vivant en France métropolitaine en 2014-2016 par rapport aux études précédentes.

 

« La répétition de ces études est nécessaire pour suivre dans le temps les évolutions des expositions de la population et contribuer à estimer l’impact des politiques publiques visant à réduire les expositions », souligne l’étude.

(1) Précédemment ont été publiés en septembre 2019 le volet concernant les substances issues des produits d’usage courant et en mars 2020 celui concernant le plomb ainsi que les résultats relatifs à l’imprégnation aux métaux en juillet 2021.