La fiscalité s’attaque lentement aux réalités agricoles. Peu de dispositifs accompagnent les agriculteurs pour jongler avec la volatilité des prix et la gestion des risques. Rappel de trois outils existants et perspectives.

1. Corriger la volatilité du revenu avec la DPA

Diminuer le revenu imposable jusqu’à 27 000 €

Pratiquer une déduction pour aléas (DPA) consiste à déduire une somme du résultat d’un exercice (et donc de diminuer l’impôt et les cotisations sociales sur des tranches hautes). La moitié de cette somme déduite doit être placée sur un compte bancaire spécifique rémunéré. L’autre moitié est « virtuelle », uniquement inscrite sur la liasse fiscale. Les éleveurs peuvent convertir tout ou partie de l’épargne en réserve de fourrage.

Chaque exploitant peut pratiquer jusqu’à 27 000 € de DPA/DPI (plafond commun) par an, dans une limite d’encours de 150 000 € (en Gaec et EARL, les plafonds sont multipliés jusqu’à quatre associés). Ce dispositif concerne uniquement les entreprises au réel imposées à l’impôt sur le revenu (pas à l’IS). Depuis 2013, il n’est plus nécessaire d’avoir souscrit une assurance récolte pour pratiquer la DPA.

 

Utiliser la DPA dans les 7 ans

La DPA pourra être réintégrée dans le résultat d’une moins bonne année et profiter ainsi de tranches d’imposition inférieures. Les conditions d’utilisation sont limitées à la survenue d’un aléa économique (s’il provoque une baisse d’au moins 10 % de la valeur ajoutée par rapport à la moyenne des trois dernières années), d’un aléa climatique ou sanitaire, ou encore d’un sinistre frappant les biens de l’exploitation. Les montants réintégrables sont ensuite plafonnés.

En l’absence d’aléa, la DPA peut être utilisée pour payer les cotisations d’assurance de l’exploitation. Les éleveurs peuvent aussi l’utiliser pour l’acquisition de fourrage en cas de calamité agricole reconnue. Le délai de réintégration est de sept ans. Au-delà, elle sera ajoutée au résultat du septième exercice, majorée d’un taux d’intérêt de retard.

 

Les assouplissements pour 2016

Le dispositif actuel ne séduit pas. Des aménagements ont été promis par le ministre Stéphane Le Foll, qui seront discutés dans la loi de finances rectificative en décembre 2015.

Pour la FNSEA, les conditions d’utilisation de la DPA devraient être assouplies et l’exploitant pourrait arbitrer librement des montants de DPA à réintégrer, sans plafond. Le syndicat demande en outre la suppression des intérêts de retard en cas de non-réintégration de la DPA dans les sept ans.

2. Deux façons d’écrêter le revenu

Pour stabiliser le montant du revenu, et donc l’impôt, il existe deux mécanismes fiscaux simples à utiliser. Le premier est l’option pour la « moyenne triennale » qui engage pour cinq ans, afin d’être imposé sur la moyenne des revenus des trois dernières années. Cette option est intéressante en cas de progression des résultats.

Le second dispositif est l’étalement des revenus « exceptionnels » (1) sur sept ans. Le « surplus » par rapport au revenu moyen sera divisé par 7 et rattaché, par fractions égales, aux résultats de l’exercice de sa réalisation et des six exercices suivants. Attention, cet étalement ne « fonctionne pas » sur l’assiette des cotisations sociales.

(1) Est considéré comme exceptionnel un résultat qui dépasse 25 000 € et excède 1,5 fois les revenus moyens des trois dernières années.

3. Pratiquer l’à-valoir social pour réguler ses dépenses

L’à-valoir social consiste à profiter d’une bonne trésorerie pour payer en avance des charges futures. Le dispositif permet de payer l’année N une partie des cotisations sociales MSA qui seront dues l’année suivante N+1. Il est possible d’avancer jusqu’à 50 % du montant des dernières cotisations appelées.

Le paiement doit intervenir avant le 31 décembre de l’année N pour que l’à-valoir soit pris en compte en N +1. La décision est à prendre chaque année.

Ce versement anticipé est déductible du résultat de l’exercice au cours duquel il a été versé, ce qui diminue l’impôt. Le montant de l’à-valoir viendra en déduction des cotisations exigibles l’année N +1.

Ce dispositif est un « régulateur de trésorerie » pour payer quand on a des disponibilités, en prévision de moins de facilités l’année suivante. Et il permet de diminuer l’impôt l’année de la pratique de l’à-valoir.