Au Gaec du Barre, à Saint-Pierre-le-Vieux en Lozère, Benoît et Leslie Charbonnier ont clairement choisi le lait. « Nous aimons traire ! », lancent-ils. Lorsque Leslie a rejoint la ferme en 2015, Benoît élevait 400 brebis laitières et produisait des veaux de boucherie avec 12 aubracs et 12 abondances. « À la retraite de mon père, j’avais échangé mon quota contre des droits à prime et introduit des aubracs afin d’alléger le travail. Mais je continuais à traire au pot pour donner le lait aux veaux, ce qui prenait du temps », explique l’éleveur. Le foncier, avec 36 îlots sur 106 ha, n’était pas adapté au pâturage des allaitantes.

Par ailleurs, le prix des veaux baissait. « En 2018, nous avons décidé de faire marche arrière. Sodiaal était prêt à revenir nous collecter. Nous avons investi dans une machine à traire d’occasion et nous avons redémarré la production de lait de vache », raconte-t-il.

Mêmes fourrages

Leur objectif est aujourd’hui d’optimiser les résultats des deux troupeaux. Les brebis, désaisonnées, agnèlent en juillet. La traite dure de mi-août à mi-avril. « Cela colle aux besoins de la laiterie, qui manque de volume l’été. Nous bénéficions ainsi d’un meilleur prix, tout en ayant le temps de finir les foins et les moissons avant d’avoir à nouveau deux troupeaux à traire », explique Leslie.

La mélangeuse sert pour les deux troupeaux. La ration hivernale des vaches comprend du foin de prairie naturelle, du foin de luzerne acheté, de l’ensilage de maïs et d’herbe, et de l’enrubannage. Au-delà d’une production de 24 l/j, elle est complétée au distributeur automatique de concentrés (dac) par des céréales et des tourteaux de soja et colza. Les brebis reçoivent les mêmes fourrages, foin de luzerne mis à part. Le blé aplati et le correcteur azoté sont intégrés dans leur ration complète, calée sur 3 l/j en début de lactation.

Les périodes de pâturage se complètent. « Les brebis à l’entretien restent au pré de mai à juillet. En fin de gestation, elles rentrent le soir pour être complémentées afin de bien préparer l’agnelage et le démarrage de la lactation », note l’exploitante. Les vaches pâturent d’avril à octobre sur les prairies les plus proches afin de faciliter les déplacements pour la traite. Les parcelles plus éloignées sont utilisées par les agnelles, les génisses et les taries.

Pour conforter les stocks tout en apportant de l’énergie dans la ration, Benoît et Leslie ont introduit du maïs ensilage. À 950 m d’altitude, en choisissant des variétés très précoces, ils obtiennent de bons rendements. Depuis trois ans, ils misent également sur des prairies multi-espèces avec des légumineuses. « Elles donnent des fourrages mieux équilibrés, avec un rendement plus élevé et régulier que le brome cultivé précédemment et elles résistent mieux à la sécheresse », constate l’agriculteur.

Depuis trois ans, les étés secs les obligent à acheter des fourrages en complément. « Pour produire nos références dans les deux laits, nous avons d’abord augmenté l’effectif. Actuellement, notre objectif est d’améliorer la productivité par tête afin de réduire un peu le nombre d’animaux. Nous devrions ainsi regagner une marge de sécurité », indique Leslie.

Gagner en productivité

En termes de productivité, le troupeau bovin est plus régulier. « Avec les brebis, il ne faut pas rater le démarrage de la lactation car ensuite on ne peut que freiner la baisse de la production, sans pouvoir la remonter », relève l’éleveur. La qualité des fourrages est d’autant plus essentielle. « En 2020 celle-ci était moyenne, la production par brebis a chuté à 280 l. En 2021, avec de meilleurs fourrages, nous sommes remontés à 340 l », précise-t-il.

Malgré ces fluctuations, les brebis dégagent davantage de marge brute par unité de gros bétail (UGB). « Cependant, nous apprécions les deux espèces et nous n’envisageons pas d’en supprimer une », souligne l’éleveuse. Les marchés peuvent évoluer différemment, ce qui partage les risques. « Pour l’instant, la demande progresse en lait de brebis et se maintient pour le lait de vache de montagne. C’est rassurant ! », ajoute Benoît.

Frédérique Ehrhard