Thierry Chanu et Philippe Beaugeard ne soupçonnaient pas que leur nouvelle stabulation allait faire décoller la productivité par vache. « Nous n’avons rien changé mis à part le bâtiment, et nous avons gagné 1 500 l par vache et par an de niveau d’étable, qui atteint aujourd’hui 12 000 l », constate Thierry, après la mise en service, en 2013, d’une nouvelle stabulation originale sous tunnel. L’amélioration des résultats s’est fait sentir dès les premiers mois. Depuis, les producteurs ont continué de bénéficier de cet « effet nouveau bâtiment ». « Nous observons beaucoup moins de mammites. Du même coup, nous rencontrons beaucoup moins de chutes de lait. L’ambiance saine dans le bâtiment contribue aussi à obtenir de meilleurs résultats. Je ne vois pas d’autre explication », analyse-t-il.
Cet effet « nouveau bâtiment » réside aussi dans le niveau génétique du cheptel, travaillé depuis l’installation des deux éleveurs en 1999, avec la recherche d’un potentiel laitier élevé. Un potentiel qui a pu s’exprimer d’autant mieux que les conditions d’élevage ont été améliorées. L’aire paillée de l’ancien bâtiment était propice aux mammites. Leur fréquence était de 15 par mois. Aujourd’hui, elle est tombée à 2 par mois, alors même que le cheptel a gagné une vingtaine de vaches. En changeant de bâtiment, les éleveurs ont également augmenté la taille du troupeau dans le but de saturer les 85 places disponibles et de diluer les frais fixes. En revanche, il a fallu racheter des droits à produire au-delà de ce qui était initialement prévu, du fait de la hausse de productivité par vache. Les taux de matière utile, initialement assez bas, ont été légèrement améliorés depuis le passage dans le nouveau bâtiment, à 39 g/kg de TB et 32 g/kg de TP indiqués par la laiterie.
Laine de verre
C’est pour réduire les frais que les éleveurs ont choisi à l’époque de s’orienter vers un bâtiment en tunnel avec une armature de serre. Le coût de la structure est inférieur d’environ 20 % à celui d’un bâtiment traditionnel. Les vaches sont aujourd’hui installées sur des logettes matelassées et paillées. Le couloir, muni d’un chien électrique, est utilisé comme parc d’attente de la salle de traite 2×8 à double équipement. La toiture du tunnel est isolée avec 8 cm de laine de verre maintenue entre deux bâches plastiques. Un battant s’ouvre et se referme automatiquement en fonction de la température de la stabulation, pour contrôler l’ambiance.
« Le bâtiment se comporte très bien lorsqu’il fait chaud. Les vaches viennent alors profiter de la fraîcheur du tunnel plutôt que de toutes se regrouper à l’extérieur sous le même arbre. Le confort est meilleur et les animaux sont plus propres. En revanche, nous n’avons pas encore de recul pour des hivers rigoureux ou neigeux. Aujourd’hui, nous espérons que le bâtiment vieillira bien », souligne Philippe.
Abandon du Dac
« Avec la mise en service du bâtiment, nous avons abandonné le distributeur automatique de concentrés (Dac) afin de réduire les coûts. Nous sommes passés en ration complète distribuée à la mélangeuse. Il n’y a plus de complémentation individuelle, indique Thierry Chanu. Nous utilisons un peu moins de concentrés qu’avant. Ce système semble être pénalisant en début de lactation, avec 4 l de moins par vache sur les 100 premiers jours de lactation par rapport aux moyennes normalisées du contrôle laitier. En revanche, nous produisons 2 l de plus entre 100 et 200 jours, et 8 l de plus au-delà de 200 jours ! »
L’aliment, distribué à la mélangeuse toute l’année, est composé de maïs ensilage, complété de 2 kg de matière sèche d’ensilage d’herbe, de 3 kg de fibre (2/3 de paille et 1/3 de foin), de 5 kg d’aliment composé spécial pour vaches laitières, ainsi que du bicarbonate. Les 5 % de refus quotidien sont récupérés pour nourrir les vaches amouillantes. « Notre approche du système alimentaire est de chercher à exprimer le potentiel laitier que nous avons sélectionné par la génétique. Ainsi nous faisons preuve d’une très grande vigilance quant à la qualité des fourrages, notamment celle des ensilages. Par ailleurs, nous essayons de réaliser le moins de transitions et de chocs alimentaires possibles. Et, bien entendu, nous cherchons toujours le meilleur compromis entre la qualité de l’alimentation et son coût. »