«Avec des potentiels de rendement variant de 70 à 85 q/ha en blé selon la qualité des sols, on ne s’en sort qu’en serrant les charges, souligne Pascal Farcy, agriculteur à Chamdpôtre (Côte-d’Or) et sociétaire du GIE des quatre épis. L’assolement en commun avec Cuma intégrale, mis en place progressivement depuis 2005, et le mode de conduite de nos cultures en SCV (semis direct sous couvert végétal, depuis 2009) ont permis de passer plus sereinement ces dernières années. »
Le GIE chapeaute l’activité agricole de quatre exploitations. Mais chacune d’elles garde sa déclaration Pac, sa comptabilité, son mode de commercialisation. Alors que les produits, les charges opérationnelles, les coûts de mécanisation et d’irrigation sont répartis au prorata des hectares apportés, chaque société couvre les charges qui lui sont propres : foncières (drainage, achat…), fermages et assurances. La règle de départ vaut que tous les hectares s’équivalent, l’éloignement ou le parcellaire compensant la plus ou moins bonne qualité des terres. Les intrants sont achetés en commun.
Le mode de fonctionnement du GIE et son esprit « agriculture de conservation des sols » ont séduit Stéphanie et Sébastien Sordel. Ils ont rejoint le GIE à l’automne 2016. Producteurs de colza, blé, orge, tournesol et maïs, le jeune couple ne se voyait pas continuer à travailler seul. « Les trois dernières années, avant d’intégrer le groupe, nous n’avons pas sorti un salaire, explique Sébastien. Alors que nous avions quatre tracteurs et une moissonneuse-batteuse pour 170 ha, nous travaillons aujourd’hui 600 ha avec le même matériel. Pour 2017, notre première année d’assolement en commun, le GIE nous a refacturé 4 500 l de fioul, alors que seuls, nous en consommions 18 000 l ! »
À chacun son rythme
Au sein du GIE, chacun assume des responsabilités dans un domaine de compétence (suivi des cultures, traitements, administratif..) mais à son rythme. Il n’est pas question de se retrouver tous les jours à 8 h pour démarrer. Une partie des membres a des activités ou responsabilités extérieures à concilier au mieux avec les tâches agricoles. Pascal Fargy est ainsi double actif, Sébastien Sordel assume des responsabilités communales et intercommunales, Samuel Maréchal préside la Cuma Fertichamp qui réalise près de 80 % du chiffre d’affaires avec le GIE.
Treize ans après le démarrage de leur groupe, une session de formation a été organisée avec la chambre d’agriculture de Côte-d’Or. Dans un premier temps, les trois exploitations « historiques » ont dressé un bilan de leur parcours. « Nous avons parlé essentiellement de relations humaines, notent Dominique Leneuf et Pascal Farcy. Les bonnes résolutions de départ ne sont pas toujours faciles à tenir à cause du quotidien et des accidents de la vie qui ont touché plusieurs d’entre nous. Agronomiquement et économiquement, ça roule tout seul, car nous partageons la même vision d’une agriculture innovante et respectueuse de son environnement. »
Aujourd’hui, avec une exploitation en plus, il faut formaliser davantage les choses, et rééquilibrer les tâches par rapport aux pratiques qui continuent d’évoluer sans cesse. « Malgré le gros bouleversement entraîné par le passage au SCV, nous n’avions pas trop modifié la répartition du travail. Les choses s’étaient faites tacitement. Habitant tous les trois le même village, on se rencontrait souvent. »
Communiquer rapidement
À cinq et sur deux communes, le besoin d’avoir des outils pour communiquer facilement, organiser le travail au quotidien et prendre les décisions se manifeste davantage. Comment, et à combien, décider de détruire ou non un couvert ? Comment faire pour gérer le suivi des cultures, une tâche essentielle dans notre système ? Doit-on l’organiser par zone géographique, par nature de culture ? « Ce point est d’autant plus important que, dans notre système de SCV, on ne peut pas capitaliser sur du connu, soulignent les sociétaires du GIE. Les pratiques évoluent en fonction des observations, expériences et connaissances. On fait des tours de plaine, on échange, il n’y a pas de guide technique clés en main. Les aléas de toutes sortes rendent difficile la planification de réunions hebdomadaires. Celles-ci ne sont pas forcément appropriées pour diffuser certains types d’informations. »
L’idéal pour Stéphanie serait un smarphone avec applications permettant d’échanger, de savoir que telle tâche a été réalisée, ou de suivre le travail de chacun. « À condition qu’il fonctionne en vocal car nous ne sommes pas tous des geeks », avance Pascal. Sur ce sujet, un travail est en cours avec la chambre d’agriculture.