Àplus de 8 €/kg de carcasse, le prix moyen des agneaux de Romain Deshais, à la tête de 400 brebis à Liglet, dans la Vienne, peut laisser rêveur. Ce chiffre est toutefois le résultat d’une gestion rigoureuse, tant pour la conduite et la sélection des animaux que pour l’organisation du travail.

« C’est mon père qui m’a appris à sélectionner les animaux bien conformés », déclare-t-il. Cet intérêt explique le croisement de brebis de pays avec des béliers texels hollandais depuis plus de quinze ans, une race réputée pour le bon rendement de ses carcasses. « Aujourd’hui, j’achète mes béliers et quelques-unes de mes brebis en Belgique, indique Romain. Je suis allé plusieurs fois sur place, mais depuis quelques années, je les achète via internet. Les derniers reproducteurs sont arrivés par transporteur à Nantes. Ils m’ont coûté de 500 à 700 € par tête. » La conformation est le critère privilégié, mais ce n’est pas le seul. La longueur des animaux ou les aplombs sont les qualités appréciées par l’éleveur. « En quinze ans, le poids de carcasse de mes agneaux a augmenté, grâce à l’allongement des carcasses, explique-t-il. L’année dernière, le poids de vente moyen était de 18, 4 kg par tête. » Ainsi, le prix moyen de vente était proche de 150 € par agneau. Ces derniers sont commercialisés sur le marché au cadran des Hérolles, situé à quelques kilomètres de l’exploitation. Romain ne rate aucun des rendez-vous, qui ont lieu un jeudi sur deux. Cela implique de préparer un lot d’agneaux homogènes dès le mercredi soir. « Je n’ai plus besoin de les peser, dit-il. En leur tâtant le dos, j’arrive à évaluer assez précisément leur poids et leur état d’engraissement. » Le lendemain, le départ s’effectue bien avant le lever du jour, pour décharger les animaux à 7 heures aux Hérolles.

Vente sur le marché

La vente commence à 9 heures. Les enchères ne conviennent pas toujours à Romain. Il arrive qu’il rentre à la ferme avec ses agneaux invendus. C’est ce qui s’est passé en mars, lors d’une vente avant Pâques. Certains de ses collègues auraient accepté l’enchère proposée, mais pas lui. « J’ai pu ainsi gagner 11 € par agneau en une semaine, explique-t-il. C’est exceptionnel. Parfois, je suis perdant. Je savais que les risques étaient limités. Il restait un autre marché avant Pâques. Mon lot était léger, 32 kg en moyenne. J’étais sûr que mes animaux ne prendraient pas trop de gras en une semaine. D’autant que le dépôt de gras est rarement un problème en texel hollandais. Même lourds, ils sont rarement déclassés. »

Le concours de Pâques, organisé par le marché au cadran, fait remonter la moyenne des prix de vente de Romain. Son lot de huit agneaux, sorti lauréat cette année, a trouvé preneur à 238 € par tête, soit près de 6 € par kg vif. C’est le bon côté du marché, qui compte cependant d’autres contraintes, comme l’apport régulier de marchandise.

Les mises bas sont étalées de septembre à mai. Les premières correspondent à des luttes de printemps après pose d’éponges. Les brebis sont conduites en lot de 80. Les échographies réalisées 45 jours après repèrent, en moyenne, 75 % des femelles gestantes. Les luttes naturelles débutent à partir de juillet. Elles concernent les brebis vides et les agnelles. Les lots d’éponge sont les plus prolifiques. « Je vise 1,5 agneau par mise bas maximum, explique l’éleveur. Je ne veux pas alimenter d’agneaux au biberon. Je pratique les adoptions. J’essaie de répartir les nouveau-nés en fonction de l’état des brebis. »

Les mises bas se passent dans de bonnes conditions. Le taux de mortalité était de 11,7 % en moyenne lors de la dernière campagne. Elles se déroulent en bergerie, sur une semaine pour les lots d’éponge. « Je m’arrange pour les suivre de près, confie-t-il. J’interviens si la brebis en a besoin, mais toujours en douceur. Les césariennes sont exceptionnelles et elles sont réalisées par le vétérinaire. »

Achat des concentrés

La conduite alimentaire avant l’agnelage est primordiale pour que les brebis soient en bonne santé au moment de cette « étape stratégique ». Un mois avant la mise bas, chaque brebis reçoit 400 g d’aliment complet acheté dans le commerce. La dose passe à 500 g par tête quinze jours après. Dix jours avant l’agnelage, Romain distribue des oligoéléments (magnésium et phosphore) et des vitamines avec un hépatoprotecteur. Après la mise bas, la ration de concentré passe à 700 g par tête. Elle vient en complément de foin de première coupe, distribué le matin. Une deuxième coupe est réservée pour le soir. Celle-ci est riche (0,83 UFL/kg l’année dernière) et limite l’apport de concentré. La consommation en aliment de l’exploitation est de 159 kg par brebis et sa suite, sachant qu’une grande partie des agneaux eux sont engraissés en bâtiment avec des aliments achetés. Seul le lot issu de la lutte naturelle sort au pâturage. Après sevrage plus tardif (à l’âge de 90 jours), les agneaux sont finis en bergerie.