«Mon exploitation est, située à Ludes, dans la Marne au pied de la Montagne de Reims, ce qui fait que j’ai une grande diversité de terre dans chacune de mes parcelles allant du sol très crayeux au sol argileux en passant par des sols sableux », explique Damien Blondel. Résultat : les analyses de sol sont très différentes d’un endroit à un autre des parcelles. « Je cherche à apporter à la plante ce dont elle a besoin, ni plus, ni moins. De plus, mon exploitation se trouve dans le bassin de captage de la ville de Reims, qui est classé Grenelle. Nous sommes donc plus surveillés qu’ailleurs. »

Lorsqu’en 2013, son épandeur à engrais arrive en bout de course, Damien Blondel opte pour un équipement à modulation automatique. « J’avais déjà un tracteur équipé de l’autoguidage RTK avec la norme Isobus (1) pour semer droit et biner plus facilement le colza et les betteraves. J’ai donc cherché un épandeur capable de moduler et de norme Isobus pour assurer une compatibilité parfaite entre les deux. » Il commence par les engrais de fond (P, K, Mg) en 2013 avec Agro-Conseil, une société de conseil de l’Aisne. « Une cartographie des différents types de sol de toutes mes parcelles a d’abord été réalisée en superposant des images satellitaires prises à différentes saisons.

Cette cartographie a ensuite été confirmée sur le terrain par Agro-Conseil. » Une analyse a été effectuée sur chaque type de sol ; elle sera renouvelée tous les quatre ans. En fonction de la rotation à venir, les doses de P, K et Mg à apporter sont calculées pour chaque type de sol et chaque parcelle. « Agro-Conseil me fournit alors, sous format informatique, une carte des besoins par zone que je transfère de l’ordinateur du bureau à la console de pilotage du tracteur via une clé USB tout simplement. La console pilote ensuite l’épandeur d’engrais pour qu’il applique la modulation au sein de chaque parcelle. »

 Dernier apport modulé 

En 2014, Damien Blondel s’attaque à l’azote sur colza via Dron’Inov, une prestation proposée par la chambre d’agriculture et réalisée par Airinov. Elle est basée sur des photos prises par drone. En 2015, il l’étend aux céréales mais part sur Farmstar (images satellitaires). Sur colza, que ce soit avec le drone ou le satellite, deux prises de vue sont nécessaires pour estimer la biomasse : une à l’automne et une autre au printemps. Celle-ci est ensuite traduite en besoin en azote et en carte de préconisation. « Je reçois la carte de préconisation avec le langage informatique adapté à mon équipement de modulation. » Mais submergé par les demandes, en 2014, le prestataire livre les cartes à Damien Blondel dix jours après la date optimale d’apport de l’azote. « En 2015, je n’ai pas voulu prendre le risque et j’ai préféré opter pour Farmstar pour le colza et les céréales (blé et escourgeon). J’ai toujours eu mes cartes en temps et en heure. »

Que ce soit sur colza ou sur céréales, c’est toujours le dernier apport qui est modulé. « Par exemple, sur une parcelle en 2016, les colzas étant gros, j’ai apporté 110 u/ha début mars lors du premier apport. Le reste a été modulé lors du deuxième apport avec des doses variant de moins de 100 u/ha à 180 u/ha pour une moyenne de 160 u/ha. Si les colzas sont plus petits, la dose du premier passage est fractionnée en deux passages. La modulation se fait alors au troisième passage. » En céréales, le satellite prend une photo de biomasse au printemps, traduite ensuite en dose préconisée. « En 2016, sur une parcelle de blé, la modulation allait de 51 u/ha à 73 u/ha. »

Cette année, Damien Blondel a également testé la technique sur toute sa surface de betterave avec Agro-Conseil. Un reliquat azoté a été réalisé en sortie hiver avec un prélèvement par type de sol dans chaque parcelle pour calculer, par zone, l’azote nécessaire à apporter avant le semis et établir une carte de modulation. « J’ai eu des variations importantes allant jusqu’à 30 u/ha au sein d’une parcelle pour une dose moyenne de 92 u/ha. »

Impact non visible 

« Pour observer un impact de la modulation de la fumure de fond, il faudra sûrement attendre un certain nombre d’années », estime l’agriculteur. « Quant à l’azote, 2016 ayant été une année particulière, comme 2015, il a été difficile d’observer l’impact en végétation. J’ai, cependant, constaté en 2015 une plus grande régularité du taux de protéines en blé. Et pour l’instant, mes rendements ne sont pas inférieurs à ceux de mes voisins. »

Damien Blondel va poursuivre la modulation sur céréales, colza et betterave. « Quand il faudra changer mon semoir, j’investirai dans un matériel capable de moduler la dose de semis en blé car selon le type de sol, on ne devrait pas semer la même densité. »

(1) Norme universelle de communication électronique entre tracteurs, équipements et ordinateurs.