«Le 15 octobre 2013, lorsque je suis sorti du CHU de Rangueil, à Toulouse, j’ai réalisé que si j’étais encore vivant, c’est que j’avais encore quelque chose à apporter sur Terre. J’ai décidé de raconter mon histoire et de me battre pour que ce qui m’est arrivé, suite à mon accident professionnel, n’arrive à personne d’autre. Le 26 septembre, alors que je récoltais du tournesol, la moissonneuse s’est bloquée. Je suis descendu dans la trémie pour faciliter la vidange des graines, mais mon pied droit a été happé par la vis de décharge. Seul en plein champ, j’ai fait un arrêt cardiaque et une hémorragie, et ai bien failli quitter ce monde.

Heureusement, les secours sont arrivés et j’ai été héliporté au CHU. Pendant 48 heures, mon pronostic vital était engagé. Le médecin, qui a choisi d’amputer mon tibia droit, m’a sauvé la vie. Après les soins intensifs et la rééducation, je suis rentré chez moi, appareillé. J’avais surmonté une épreuve, mais d’autres m’attendaient. Le banquier m’a expliqué que, bien qu’ayant perdu une jambe, mon taux d’invalidité ne suffisait pas pour bénéficier de l’assurance décès invalidité de mon emprunt. Puis, il m’a annoncé que j’étais interdit bancaire.

Succession de problèmes

L’assureur ne s’est pas mieux comporté et a joué sur les mots. Je n’étais pas assez handicapé pour être pris en charge par mon assurance prévoyance. Pourtant, je ne pouvais plus travailler et j’ai perdu une de mes entreprises agricoles.

De son côté, la MSA a refusé le remboursement d’une prothèse articulée de 6 200 euros, adaptée à ma situation, qui devait m’aider à reprendre le travail. Pourtant, celle-ci devait me permettre de récupérer mon permis super lourd. S’il avait fallu aménager mes camions, cela aurait coûté 14 000 euros.

Heureusement, un grand élan de solidarité s’est organisé autour de moi. Avec l’aide de mes amis et de la coopérative Gersycoop, le fonds de dotation Donagri a été créé pour aider financièrement, mais aussi moralement et administrativement, les personnes dans mon cas. De mon côté, suite au refus de la prise en charge du pied articulé par la MSA, j’ai saisi le tribunal des affaires de Sécurité sociale à Auch. Le jugement m’a été favorable, mais la direction de la MSA a fait appel. Le prochain procès aura lieu à Agen. Je compte sur le soutien du monde rural, car l’enjeu est majeur. » Propos recueillis par Florence Jacquemoud