Ne plus avoir d’épée de Damoclès au-dessus de la tête concernant les restrictions d’usage de l’eau demande d’adapter son assolement. Au point de remplacer toutes ses cultures de printemps irriguées par un assolement en sec ?
Selon Mathieu Lerat, d’Agro d’Oc Union des Ceta d’Oc, « l’arrêt de l’irrigation n’est envisageable que dans de rares cas car peu de cultures en sec permettent de faire face aux charges fixes d’irrigation. Elles atteignent jusqu’à 350 €/ha avec les droits d’accès à l’eau, les compteurs électriques, l’amortissement du matériel et des installations (pompes, canalisations, enrouleurs, pivots…). » Cela est possible sur une partie de l’assolement seulement, en choisissant des cultures robustes en conditions stressantes comme le sorgho, le tournesol ou le maïs précoce en sec.
Cultures de remplacement
Sorgho ou tournesol
Le sorgho répond bien à des restrictions en eau et il est peu exigeant en intrants, « du fait de sa bonne capacité racinaire à extraire l’eau et les éléments nutritifs, précise Jean-Luc Verdier, d’Arvalis. L’essentiel des charges de production provient du désherbage. » La gestion de l’enherbement (panics, ray-grass résistants, dicotylédones estivales) est un point clé de la réussite de la culture.
Le tournesol résiste également aux conditions sèches, même s’il n’aime pas les sols légers. Il exige aussi peu d’intrants. Deux irrigations bien positionnées offrent à cette culture (en variétés linoléiques ou oléiques) d’accroître significativement son rendement et ainsi de concurrencer économiquement les cultures phares du système irrigué, à savoir le maïs et le soja en potentiels de production limités (maïs < 12,5 t/ha et soja < 4 t ha).
Maïs précoce, en sec
Concernant le maïs en sec, la stratégie consiste à semer des variétés très précoces tôt (fin mars), dans des sols ressuyés. La floraison du maïs interviendra avant les périodes très chaudes et sèches, dans un sol avec une bonne réserve utile. « Le maïs permet de gérer le salissement en dicots estivales, mais aussi en ray-grass résistants », note Mathieu Lerat. Mais attention, il ne doit pas être positionné dans des sols trop séchants à faible potentiel, il préférera les sols profonds.
Enfin, « la modulation des densités de semis, selon les types de sol dans la même parcelle, permet d’optimiser le processus de programmation du maïs au regard du stress hydrique, et par conséquent d’augmenter sa performance », précise l’expert.
Deux autres scénarios
Réduire les tours d’eau
En irrigation limitante, des cultures, comme le tournesol ou le sorgho, moins gourmandes en eau l’été que le maïs ou le soja, peuvent être privilégiées et tireront parti de quelques passages.
Allonger les rotations
Une autre solution est d’intensifier les cultures d’hiver (blés, orge, colza, protéagineux), qui peuvent valoriser des tours d’eau au printemps.
« Dans la vallée de la Garonne, depuis dix-quinze ans, la sole de maïs irrigué a nettement diminué, certes au profit du soja irrigué, mais aussi à celui des blés tendres et blés de force irrigués. On a ainsi assisté à un allongement de la rotation des cultures », constate Mathieu Lerat, avec un bénéfice complémentaire, la meilleure gestion des adventices (datura, xanthium, sicyos, ray-grass résistants…) et des maladies (sclérotinia, pythium…). Florence Melix