Plus adaptée à un mix d’intrants à forte teneur en matière sèche (MS), la méthanisation en voie épaisse présente l’avantage de tolérer une plus grande diversité dans les biomasses entrantes. Cette technologie repose sur un taux de MS suffisamment élevé pour obtenir une matrice pâteuse, déformable et relativement homogène. En entrée de digesteur, il y a de 20 à 40 % de MS pour une valeur en sortie comprise entre 15 et 25 %.
Il est à noter que la consistance ne dépend pas uniquement de ce paramètre, mais aussi de la nature des intrants et de leur broyage. C’est notamment vrai pour du fumier, dont la viscosité est fortement influencée par le niveau de finesse du broyage.
Moins d’espace occupé
Les unités de méthanisation en voie épaisse sont globalement plus compactes que celles en voie liquide. De fait, la densité de biomasse méthanogène y est plus élevée. Il en découle une forte concentration en micro-organismes qui amoindrit la nécessité de recycler les jus. Cette caractéristique, combinée à la taille réduite du méthaniseur, diminue les différents flux de matière. Il est néanmoins primordial d’être prudent et de ne pas atteindre un mix trop sec. Le dépassement d’un certain seuil mène, en effet, à une réduction de l’activité biologique. L’optimum de fonctionnement varie suivant la ration. De plus, un taux de MS trop élevé engendre aussi des difficultés de mélange en raison d’une trop forte consistance.
Pierre Buffière, enseignant-chercheur et directeur du laboratoire DEEP (1) de l’Insa de Lyon, met en avant la forte réduction de la sédimentation et de la décantation dans le digesteur. Cela constitue un avantage étant donné que ces phénomènes accélèrent l’usure et conduisent surtout à une perte de volume utile du digesteur.
L’importance d’un bon dimensionnement
Si le fonctionnement d’une unité en voie épaisse repose sur les mêmes principes que pour son homologue plus humide, le choix d’un matériel adapté est indispensable. Ainsi, le circuit de pompes doit être apte à faire circuler des fluides plus épais et visqueux.
Du côté de l’agitation, plusieurs modes de mélange sont possibles. Il peut être horizontal, pneumatique (par soufflerie de biogaz), par circulation ou bien grâce à un agitateur mécanique. Dans ce dernier cas, Pierre Buffière recommande plutôt d’utiliser des agitateurs à vitesse lente qui ont plus de couple que leurs homologues à vitesse rapide et assurent un brassage plus diffus de la matière. Le spécialiste insiste avant tout sur la priorité d’un bon dimensionnement et positionnement de l’ensemble du matériel par rapport aux spécificités du digesteur et de sa ration. La surveillance de la consistance du digestat permet d’adapter le taux de MS en entrée pour ajuster les différents paramètres du process.
En ce qui concerne la température, la recherche scientifique ne met pour l’instant pas en avant de choix à privilégier. « La plus forte compacité des digesteurs par voie épaisse les rend toutefois plus faciles à chauffer, explique Pierre Buffière. La part d’unités qui suivent un procédé thermophile (50 à 65 °C) y est ainsi plus élevée qu’en voie liquide. »
G. Baron
(1) Déchets, eaux, environnement, pollutions.