Chaque semaine, des commerçants et grossistes français prennent la route en direction du centre agroalimentaire de Turin. Sur place, depuis 4 heures du matin, les 80 grossistes et les 170 producteurs italiens s’affairent dans les 440 000 m2 de surface pour organiser les étals. Situé à l’origine dans le centre-ville, ce marché de gros a été déplacé en périphérie pour répondre aux besoins de surface. « Les clients sont en majorité des grossistes qui livrent le marché de Porta Palazzo et d’autres villes du Piémont, ainsi que 10 à 20 % de clients français », explique Stefano Cavaglio, président de l’association des grossistes de la filière fruits et légumes (APGO).
Qualité, quantité et prix
Si des Français viennent jusqu’ici, c’est pour les fruits et légumes italiens. « J’achète ce que l’on ne trouve pas en France et qui va surprendre le client », explique Françoise Di Girolamo, commerçante grenobloise qui s’approvisionne ici depuis longtemps. Il suffit de la suivre entre les étals. « Regarde-moi cette couleur ! Ce sont des tomates du Vésuve. Il y a aussi des aubergines rondes, des poireaux de Cervere… »
Le climat italien permet d’avoir des produits quelques semaines plus tôt qu’en France. L’intérêt vient aussi de la quantité. Jean-Yves Abeil, un grossiste basé à Briançon, fait le trajet deux fois par semaine. « Je remplis l’entrepôt et je livre nos cliens un peu partout dans l’Hexagone. Je prends, par exemple, du fenouil, difficile à trouver en grande quantité chez nous, et aussi des oranges, des clémentines. »
Mais il y a autre chose…, les prix. « C’est moins cher. Il n’y a rien d’affiché, on demande et ça se discute », explique Françoise Di Girolamo.
Les produits italiens seraient donc moins chers, mais les denrées françaises vendues sur le marché le sont aussi. Pour un négociant italien, cela n’a rien d’étonnant. « Je charge un gros camion, je vais chercher des produits en France et je les vends ici, dit-il. C’est l’avantage de l’Union européenne. Avant, seulement des grossistes français s’approvisionnaient ici. Aujourd’hui, les détaillants viennent aussi chercher les produits. » Sans oublier que tous les fruits et légumes sont rassemblés au même endroit, et en quantité, facilitant la logistique des commerçants.
Améliorer la logistique
Si les négociants italiens sont fiers de leurs produits, Stefano Cavaglio voit plus loin. « Le made in Italy est très compétitif, avec un bon rapport qualité-prix et une bonne présentation des denrées. Mais les producteurs doivent améliorer leur logistique et apprendre à se regrouper pour réaliser des investissements. Il n’y a pas encore cette mentalité. »
Ce constat est partagé par les Français : « Il y a toujours deux trois erreurs d’étiquetage ou une belle palette au-dessus et les moins belles en dessous. » Améliorer la logistique du marché et celle du transport : ces deux points cités par les négociants sont jugés coûteux. Cela ne les empêche pas de prendre leur camionnette pour passer la frontière au milieu de la nuit.