Intérêt pour le producteur

« Thé de Darjeeling » pour l’Inde, « fromage Manchego » pour l’Espagne, « Tête de Moine » pour la Suisse, « chou de Kupus » pour la Serbie, « café Kona » pour les USA, « safran du Maroc »… Nous avons mené une étude pour le compte de la FAO (1), sur les indications géographiques (IG). Notre analyse a porté sur dix produits issus de dix pays sur les cinq continents. Nos résultats montrent que, dans tous ces cas, les protections géographiques génèrent des prix de vente plus élevés, y compris pour le producteur. Là où nous avons pu étudier en détail les filières, la prime de rémunération au producteur allait au-delà d’une simple compensation des contraintes de production de ces produits. Globalement, les IG assurent un meilleur retour sur investissement pour le producteur et une meilleure stabilité du revenu.

Davantage de volume

La reconnaissance d’un produit en IG est également porteuse en matière de volumes. La reconnaissance de l’indication « Thé Darjeeling » par l’Europe en 2011 a fait exploser les volumes. Cela ouvre de nouveaux marchés vers toute une catégorie de consommateurs qui sont prêts à payer pour être assurés de l’authenticité d’un produit et de son histoire. Il en a été de même en Grèce pour la feta.

Besoin des industriels

Ce sont souvent les industriels qui ont la capacité et le savoir-faire pour trouver de nouveaux marchés. Cela les place en situation de force pour capter la valeur ajoutée. En Serbie, un industriel a développé un procédé de conditionnement original du chou de Kupus sous indication géographique. Il n’en a pas fait pas profiter les producteurs. Cependant, on aurait tort d’opposer les producteurs aux industriels.

En Espagne, l’arrivée des industriels et l’assouplissement du cahier des charges ont sauvé le fromage Manchego et les producteurs de l’appellation. Avec leur force de frappe, mais soutenus par la force d’une indication géographique, les industriels ont trouvé de nouveaux marchés à l’exportation.

Pour le bien commun des territoires, les cahiers des charges doivent parfois s’assouplir en veillant que les promesses faites aux consommateurs puissent être tenues et que les produits artisanaux puissent conserver leur place. Les producteurs doivent s’organiser pour ne pas voir fuir la valeur.

Un système ouvert

Les IG protègent un nom, mais ne sont pas protectionnistes. C’est un système moderne, ouvert à la concurrence, qui offre des garanties au consommateur et capable de conquérir les marchés mondiaux ! Elles peuvent être un moteur de développement incroyable pour les pays du Sud. Certains freins restent à lever. Le ticket d’entrée au sein de l’IG, en termes de certification et de formation, est parfois bloquant pour les plus petites structures. Par ailleurs, il n’y a pas une seule IG d’Afrique certifiée par une organisation africaine. C’est dommage. Mais les pays du Sud avancent très vite sur ces sujets.

Alexis Dufumier

(1) Étude coordonnée par la FAO (Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), réalisée avec un consortium de chercheurs dont également Catherine Teyssier (FAO) et Emilie Vandecandelaere (FAO).