Dans notre société, le travail signe notre identité sociale. Alors, pour certaines personnes, la retraite représente une véritable crise identitaire, comme l’adolescence. Elles vont devoir renégocier l’image qu’elles renvoient aux autres : qui suis-je désormais, à quoi est-ce que je sers ? C’est encore plus vrai pour ceux qui se sont beaucoup investis dans leur carrière. Cesser son activité professionnelle constitue en quelque sorte le ‘dernier’ virage, celui que nous entamons avant un lent déclin vers la vieillesse, donc vers la mort. Ce passage est plus délicat pour les hommes, car chez eux, la soixantaine correspond à un corps qui fonctionne moins bien. Les femmes qui ont dû négocier cette étape à la cinquantaine, à la ménopause, et qui souvent ont investi d’autres champs d’épanouissement (famille, activités culturelles, sportives, engagement associatif…) le ressentent moins. Ces phénomènes sont symptomatiques d’une époque : nous sommes dans la psychologie de l’avoir et non de l’être. Si nous sommes dépossédés de notre travail, nous avons l’impression de n’être plus rien, nous avons le sentiment que rien ne nous ‘tient’. Dans ces moments, le corps peut lâcher, la maladie survenir.

Pour aider votre cousin, vous pouvez lui suggérer de parler de ce qu’il ressent à ses proches, à des amis dans le même cas que lui. Verbaliser permet d'évacuer ses pensées négatives. Echanger sur le sujet au sein de son couple est important, car l’avancée en âge, chez l’homme, a aussi un impact sur sa fonction sexuelle, ce qu’il vit mal. Si cela ne suffit pas, votre cousin devra consulter un thérapeute. Quelques séances chez un psychologue, un hypno-thérapeute ou une thérapie comportementale et cognitive (TCC) peuvent aider à passer ce cap difficile. En outre, votre cousin doit trouver des lieux où il peut valoriser qui il est, en déployant des compétences acquises tout au long de sa vie. Ces savoirs ne sont pas forcément en rapport avec son ancien métier, mais peuvent être liés à des passions, des loisirs. Conserver ses anciens collègues comme amis est une fausse bonne idée. Il ne faut pas forcer les choses. Si ce sont de vrais amis, les liens établis perdureront. Sinon, ils s’estomperont naturellement, au profit d’un nouveau tissu relationnel amical, social.

(1) Auteur de « Les maladies ne tombent peut être pas du ciel: Comment les événements négatifs ont un impact sur notre santé ». Mai 2022. Editions Dunod.

© D. Péronne - Cyril Tarquinio est professeur de psychologie clinique à l’Université de Metz.