Juchés sur leurs tracteurs, piqués d’un drapeau jaune et rouge étoilé, les agriculteurs ont fait plusieurs sorties remarquées lors des dernières manifestations qui ont secoué la Catalogne depuis le 1er octobre, jour du référendum contesté sur l’indépendance. Plusieurs griefs se font entendre. À commencer par la discrimination que leur ferait subir Madrid eu égard aux autres provinces espagnoles. Dans le cadre du plan de développement rural (PDR), le ministère de l’Agriculture national a réduit de 20 % ses investissements, de 1 000 à 810 M€, se plaignent-ils. Et d’ajouter : « Nous serions mieux traités si nous avions une relation directe avec Bruxelles. »

Sortie de l’Union européenne

Reste que, selon plusieurs personnalités politiques, la Catalogne serait, si elle devenait indépendante, dans l’obligation de quitter l’Europe, du moins dans un premier temps, et, plus suicidaire, son marché unique. Aujourd’hui, en effet, la Catalogne exporte 75 % de ses produits agricoles en Europe et bénéficie des politiques commerciales préférentielles de l’UE. « En cas de sécession, ce serait le tarif normal qui s’appliquerait aux produits catalans à l’entrée du marché unique, met en garde César Lumbreras, le directeur du site d’informations agricoles Agropopular. Leur traitement serait moins favorable que celui appliqué à ceux du Maroc ou de l’Égypte qui ont des accords avec l’Europe. » Côté recettes, il faudrait également s’attendre à une période transitoire difficile puisque 25 à 30 % des rentrées annuelles des agriculteurs proviennent de Bruxelles. « On chiffre à 300 M€/an les aides directes perçues et à 348 M€ celles du développement rural (2014-2020) », ajoute le directeur.

Les conséquences seraient loin d’être neutres pour les agriculteurs espagnols également. « La Pac donne de l’argent aux secteurs les plus compétitifs de chaque région », explique Luis Cortés, le président de l’Union des agriculteurs et éleveurs d’Estrémadure. En Catalogne, les trois piliers de l’agriculture sont le cochon blanc, le raisin et les fruits comme les pommes et les poires qu’elle vend en abondance au reste de l’Espagne. « En cas d’indépendance, l’alternative serait de nous fournir des pommes et des poires de France ou du porc d’Italie, qui sont en dehors de la Catalogne les marchés les plus compétitifs. » Affaire à suivre, le 21 décembre prochain, jour de nouvelles élections en Catalogne.