A Bérulle, dans le pays d’Othe (Aube), Luc et Florence Sezeur sont éleveurs sur 190 ha, dont 50 ha de prairies permanentes en zone non cultivable, en raison d’une pente supérieure à 15 %. Seules les 50 vaches allaitantes et les génisses à l’engraissement peuvent valoriser ces terres. Autre handicap : les cultures sont implantées dans des terres à silex qui usent très vite le matériel. « Nos charges de mécanisation sont deux fois plus élevées que la moyenne de l’Aube, explique Florence Sezeur. Un train de pneus dure au maximum un an et demi. » Les rendements sont également moins élevés que la moyenne auboise. D’où le classement de la commune en zone défavorisée, comme 16 autres, en 1976.

Or le nouveau projet de zonage les en exclut en raison d’un rendement de référence départemental en blé (72,6 q/ha) supérieur à la moyenne nationale. « Mais nous n’atteignons jamais ce rendement. Il était de 66 q/ha en 2017 chez nous comme pour la plupart des exploitations autour. » Ce que confirme la FDSEA : « La diversité du potentiel des terres est telle dans l’Aube qu’une moyenne départementale ne veut rien dire. »

Démotivation

Ce déclassement fera perdre 7 000 € à Luc et Florence Sezeur, soit 11 % des aides de l’exploitation. « Cette aide nous permettait de maintenir le troupeau et d’investir dans la génétique. Étant donné les prix de vente en élevage bovin, s’il n’y a pas de petits coups de pouce comme l’ICHN, on arrête tout. Nous ne sommes plus qu’une quinzaine d’éleveurs dans le pays d’Othe, mais nous façonnons le paysage là où le tracteur ne peut aller. »

Il pourrait également y avoir une conséquence touristique. Grâce à sa proximité avec Paris et à ses paysages (relief, élevage), la région attire les Parisiens en week-end ou en vacances. « Je suis très démotivée. Pour faire face à la perte de l’ICHN, peut-être faudra-t-il augmenter le taux de chargement à l’hectare ou vendre en direct. Mais nous commençons à fatiguer physiquement et psychologiquement », conclut Florence Sezeur.