Située au cœur de la zone concernée par le projet d’aéroport du grand ouest (AGO), l’exploitation de Bellevue aurait dû être expropriée. Mais depuis des années, elle est conservée et entretenue par le Collectif des organisations professionnelles agricoles, Copain, proche de la Confédération paysanne. La guerre de tranchées autour du projet dure depuis son lancement, il y a quarante ans. Elle pourrait trouver une issue dans les prochaines semaines. Les médiateurs nommés par le gouvernement doivent rendre leur avis en décembre. Il sera suivi par la décision du gouvernement sur la concrétisation, ou non, du projet. Si la Confédération est le syndicat agricole le plus opposé dans ses positions et actions, FDSEA, JA et Coordination rurale (CR) le sont aussi.
Pourtant, au syndicat mixte qui porte le projet, on estime avoir fait les choses dans les formes. Sur les quarante chefs d’exploitation concernés, « trente-deux ont vendu à l’amiable et ont pu être relocalisés », souligne Philippe Grosvalet, président du syndicat mixte. Quatre sont partis à la retraite ou ont arrêté leur activité, quatre s’opposent encore à l’opération et sont sous le coup d’une procédure d’expropriation. » Il insiste sur le fait que « sur les 1 239 ha de la concession, 463 sont dédiés aux compensations et 225 resteront à vocation agricole ». Mais le monde agricole n’est pas convaincu. À la FDSEA 44, Mickaël Trichet, son président, rappelle l’importance des 1 650 ha concernés par la déclaration d’utilité publique (DUP). Il déplore « un projet fortement consommateur de foncier », alors que la population du département augmente de 15 000 habitants par an et que les terres agricoles sont déjà touchées par l’urbanisation.
DUP bientôt caduque
Catherine Laillé, à la tête de la CR, a les mêmes griefs, auxquels elle ajoute celui de la compensation environnementale : « L’aéroport doit être construit sur des zones humides, qu’il faudra reconstituer sur le double de surfaces, et sur des bonnes terres. » Les deux syndicats sont aussi en phase sur ce qu’il se passera après la décision du gouvernement. Quelle qu’elle soit, ils l’accepteront.
L’écho est différent à la Conf’, qui, même en cas de réponse positive, ne croit guère à la concrétisation de l’aéroport. D’une part, une cinquantaine de dossiers d’expropriation font l’objet d’un recours auprès des tribunaux. En effet, la loi indique que si un projet ayant justifié une expropriation ne s’est pas concrétisé cinq ans plus tard, les terres doivent être rétrocédées. D’autre part, la DUP aura dix ans en février prochain. Et sera, de ce fait, caduque. Si l’aéroport ne se fait pas, ce syndicat a déjà travaillé au devenir des terres (lire encadré), « pour répondre à ceux qui disent que ce serait une catastrophe », ironise Dominique Deniaud, son président.