Pour connaître la position du gouvernement sur les phytos, il faut savoir d’où vient le vent. Car selon les ministres, on peut passer d’une position dogmatique à une autre plus réaliste, le ministre de l’Agriculture naviguant souvent entre les deux. Lors de la séance de questions au gouvernement, le 4 février, le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, représentant Didier Guillaume, a ainsi exprimé la nécessité de faire confiance aux avis scientifiques de l’Anses, alors que pour certains, notamment des parlementaires, « tous les moyens sont bons pour interdire tous les produits phytosanitaires ». Laurent Nuñez a également rappelé une vérité : un quart des substances actives vendues est constitué de produits utilisables en agriculture biologique. Car il ne faut pas l’oublier, alors que les conversions en bio se poursuivent, le soufre (première substance active, avec 16 % des volumes) et le cuivre s’utilisent en kilos et non en grammes de matière active par hectare !
Des éléments qu’il faut avoir à l’esprit lorsque, comme début janvier, les opposants aux produits de synthèse s’alarment de la croissance des ventes de phytos en 2018. Des chiffres qu’il convient de relativiser en tenant compte de l’anticipation d’achats liés à la hausse de la redevance pour pollution diffuse, mais également des conditions climatiques, avec la pression des maladies et ravageurs sur les cultures.
Car les évolutions doivent être analysées sur plusieurs années. Ainsi, les ventes des substances les plus préoccupantes ont diminué, alors que celles des produits à faible risque progressent nettement. Et selon les industriels, les quantités de matières actives ont baissé de plus de 40 % en vingt ans. Il faut donc continuer dans ce sens, en s’inscrivant dans la durée pour disposer de nouvelles solutions.
Le bilan du contrat de solutions (lire en page 18), qui identifie près de trois cents leviers mobilisables pour réduire l’utilisation des phytos, montre ainsi que l’emploi des OAD (outils d’aide à la décision) se développe, entraînant la baisse des fongicides sur certaines cultures.
Le choix de variétés résistantes progresse également. Et surtout, le nombre de produits de biocontrôle devrait augmenter. Car comme le montre notre dossier (page 44), ceux-ci sont surtout utilisés en arboriculture, viticulture et maraîchage, mais encore peu en grandes cultures, vu le faible nombre de solutions disponibles. La recherche doit donc s’intensifier. Sensibilisation et formation des agriculteurs à des alternatives efficaces et rentables feront le reste, et non les diktats de politiques ou d’ONG déconnectés du terrain.