Les annulations en cascade du début du confinement laissaient craindre le pire : la déroute de la saison estivale à laquelle n’aurait pas échappé le tourisme à la campagne. Depuis, et même si les manques à gagner du printemps restent inscrits dans les comptes, un grand bol d’air est arrivé. Au point que les demandes de réservation ont fleuri comme pâquerettes sous un soleil plus radieux (lire A la une p. 16). Au-delà des taux de remplissage qui s’affichent dans le vert pour nombre de départements ruraux, avec des pics inédits dans plusieurs cas, l’opportunité d’exploiter un « nouveau réservoir » de vacanciers se dessine. À condition que ce choix ne soit pas un choix par défaut : celui de ne pas pouvoir voyager à l’étranger ! Mais pour bien des citadins, l’étranger, ou en tout cas ce qu’il représente en dépaysement, n’est peut-être pas à aller chercher très loin !
Quand on parle de densités de population de quelques dizaines d’âmes au kilomètre carré dans les campagnes, comparé à plusieurs milliers dans les grandes villes, on comprend mieux pourquoi la frustration du confinement donne aux citadins une belle appétence pour les grands espaces. La notion de distanciation sociale, au sens sanitaire du terme, se fait d’ailleurs assez naturellement.
Gageons cependant que la notion de réassurance sanitaire n’est pas la seule motivation des vacanciers pour ce regain d’attrait des campagnes, qui arrivent, selon plusieurs enquêtes récentes, en seconde position derrière les stations balnéaires.
La quintessence de nos campagnes réside en effet dans leur richesse patrimoniale, historique et gastronomique, ou tout simplement dans leur art de vivre. Que l’on peut considérer comme une forme d’éloge de la lenteur (relative !) par rapport à la frénésie des métropoles. Le contexte offre aussi la possibilité de mieux faire se comprendre différentes catégories de population, les agriculteurs faisant l’objet d’attaques régulières sur leurs pratiques.
Reste à savoir combien de projets de vacances se concrétiseront en projets de vie plus durables, le télétravail aidant et vu le nombre de petites entreprises à reprendre. Des départements ont saisi cette opportunité pour jouer de séduction en ce sens, espérant que la diagonale du vide d’aujourd’hui puisse devenir demain un chemin de reconquête rurale. Essayer la vie à la campagne c’est peut-être l’adopter. Et qui sait, donner du sens à ses vacances, n’est-ce pas déjà (re) donner du sens à sa vie ? ! Un pari osé mais qui mérite d’être tenté, pour rééquilibrer les centres de gravité économiques et sociaux de notre pays.