Les agriculteurs français n’ont pas fini de payer le caprice présidentiel du glyphosate et son addition corsée. C’est ce que montre le rapport de la mission parlementaire de sortie du désherbant (lire p. 20). Car si on en est là, face à de nombreuses impasses agronomiques et un calendrier impossible (1er janvier 2021), c’est bien à cause d’un tweet éruptif et rageur, façon Donald Trump, envoyé par Emmanuel Macron, alors qu’il venait d’apprendre la réhomologation européenne de l’herbicide. Du coup, on allait voir ce qu’on allait voir, la France serait un phare mondial dans cette affaire et sortirait fissa de l’utilisation de ce désherbant. Et on a vu…. Un « joyeux » bazar depuis. Le Président français s’est piégé tout seul ce jour-là. De rapport Inra en mission d’information, de couleuvres avalées par les parlementaires en contradictions agronomiques flagrantes (lire p. 12), notre pays est aujourd’hui emberlificoté dans ce dossier.
Si le glyphosate cristallise autant les passions et l’acharnement écologiste, c’est aussi parce que c’est une molécule clé et pas seulement un symbole. Un verrou agronomique que certains se sont employés à faire sauter, en chauffant à blanc l’opinion pour mieux torpiller l’agriculture conventionnelle et la prometteuse agriculture de conservation. Onze agences sanitaires de par le monde, dont l’Anses, l’ont blanchi dans leur analyse de risques. Leurs experts seraient-ils tous vendus ? Les lobbies ne sont pas l’apanage que de l’agrochimie et existent aussi chez les écolos… Qu’on se le dise !
Le rapport intermédiaire, sorti mardi, énumère une multitude de cas où ce sera plus que compliqué de s’en passer (agriculture de conservation, petites terres à cailloux, vignes et vergers en pente, semences, lin textile, légumes frais et de conserve, élimination de plantes toxiques comme le datura, la morelle et l’ambroisie, etc.). Sans glyphosate, on augmentera les passages mécaniques et du coup les émissions de CO2. Le chiffre de 226 000 t figure dans le rapport pour les seules grandes cultures. Alors que le premier personnage de l’État nous rebat les oreilles avec « l’urgence climatique » et exhorte les Français à faire des progrès… Autres enseignements : 12,7 millions d’heures de main-d’œuvre supplémentaires (à condition d’en trouver n’est-ce pas ?), une consommation de carburant multipliée par trois ou quatre, des investissements en matériels nouveaux, etc. Au total, la douloureuse, rien que pour ces grandes cultures, est estimée entre 50 et 150 €/ha. « La transition aura un coût substantiel », écrit la mission, avec un certain euphémisme. Dans le bilan agricole du quinquennat Macron, cette décision impulsive et lourde de conséquences s’annonce, d’ores et déjà, comme l’une des pires « taches » du mandat.