C’est un spectacle qui crève les yeux et le cœur, et qui se chiffre en dizaines de milliers de tonnes en France. Une sorte de septième continent terrestre – en référence à ce qui se passe avec l’accumulation de déchets plastiques dans l’océan Pacifique –, dispersé dans les champs. Les dépôts sauvages des bords de parcelles, voire enfouis à l’intérieur de celles-ci, jettent le discrédit sur un pays classé première destination touristique au monde. Ils laissent aussi planer une ombre sur les récoltes, qui révèlent leur lot de mauvaises surprises lorsqu’arrivent faucheuses et moissonneuses. Sans oublierla qualité des produits alimentaires en jeu et les pertes financières pour lots rejetés. Ou encore le coût pour des collectivités, qui ont d’autres priorités budgétaires.
Ce n’est pas faute de voir les initiatives se multiplier pour remédier à ce fléau : opérations collectives de ramassage, panneaux sur le bord des routes, utilisation de techniques de surveillance parfois sophistiquées… Y compris les mesures de rétorsion ou les amendes de plusieurs milliers d’euros prévues. Las, la situation ne s’améliore guère et le principe pollueur-payeur a du mal à s’appliquer, souvent faute de flagrant délit constaté.
Ce miroir d’incivisme reflète les travers de modes de consommation producteurs de déchets. À l’heure des bons principes écologiques et de biodiversité (lire en page 24), pour lesquels un nombre croissant d’agriculteurs se mobilisent, les bases même du respect de la nature sont dévoyées par trop de personnes coupables. Pourtant, pas besoin de moyens lourds : il suffirait d’une éducation qui inculque plus fermement les responsabilités en la matière, dès le plus jeune âge. Un travail de fond et coordonné reste à construire, dans lequel les agriculteurs ont toute leur place, pour faire entrer des gestes simples dans les mœurs. D’autant que les systèmes de tri et de collecte sont devenus accessibles dans la plupart des villages. Il en va de l’image des fruits de notre travail.