Dans le dossier glyphosate, Emmanuel Macron a emprunté à Donald Trump une de ses pires manies : le « tweet décision », une saillie de quelques mots, dictée sous le coup de l’émotion et postée sur le réseau social Twitter. C’était le 27 novembre dernier en fin d’après-midi, alors que l’Union européenne venait, à la surprise générale, de réhomologuer le glyphosate pour cinq ans.

Un camouflet pour celui qui voulait être le phare de l’Europe en matière d’alternatives aux phytos, et qui pensait que les autres pays allaient se mettre à son diapason. Pris au piège de sa propre posture, en s’enfermant via ce tweet dans un ultimatum intenable, « trois ans au plus tard » pour la sortie du glyphosate, le président français n’en finit pas de traîner ce boulet, et le gouvernement de s’enferrer. Cela nous a valu, depuis novembre, nombre de couacs, des déclarations contradictoires à répétition entre ses deux « ministres de l’Agriculture » (Travert et Hulot), et plusieurs torsions de la réalité scientifique et agronomique (réentendre ses propos au SIA concernant le verdict des agences et son interprétation inexacte du rapport Inra : il suffit d’écouter le président de cet institut parler devant les sénateurs et, surtout, de le lire).

Cela nous vaut aujourd’hui un nouveau coup de menton (lire p. 21), ou plutôt une opération de communication grand-guignolesque des deux mêmes ministres, avec une « task force » qui leur rapportera tous les trois mois les avancées… (c’est bien mal connaître le temps de l’agronomie et celui de la recherche !) Qui peut croire à une telle farce ? On finirait par oublier d’où l’on vient, à savoir un acte d’accusation pour le moins controversé : une seule agence de par le monde a classé le glyphosate « cancérogène probable », quand toutes les autres disent le contraire. Surtout, une étude épidémiologique gigantesque de l’AHS (1), sur plusieurs années, auprès des utilisateurs de glyphosate l’a dédouané. Alors pourquoi un tel acharnement ? Était-ce bien la place d’un président de s’occuper de glyphosate ?

(1) Agricultural Health Study.