Ce n’est déjà pas si mal : fermiers et propriétaires s’entendent aujourd’hui sur « l’urgence » de réformer le statut du fermage et son corollaire, le contrôle des structures (lire À la une, p. 14). Et pas seulement du rafistolage, comme ce fut le cas lors de précédentes lois d’avenir ou d’orientation agricoles !

Reste à savoir comment mieux concilier régulation de l’usage des terres et droit de propriété. Et, surtout, comment éviter que la sécurité des uns n’entache – trop – la liberté des autres. La création du fonds agricole et du bail cessible en 2006 était censée mettre de l’huile dans les rouages. Plus de dix ans après, l’effet escompté semble mince. La superposition de couches et d’organismes associés à la gestion du foncier rend toujours le dispositif peu lisible, donc soumis à suspicion. Cela incite à le contourner, notamment à travers des montages sociétaires, ou de prestation de services.

Une loi foncière spécifique est prévue dans le quinquennat. Du coup, les esprits s’animent et les juristes rivalisent de propositions.

L’assistance garnie lors du colloque de droit rural, à Poitiers en mars, témoigne de l’intérêt du débat. D’où se dégage le principe d’une seule instance régulatrice, gage de plus de transparence. Les notaires ne sont pas en reste : ils ont produit un livre blanc sur le foncier agricole, dans lequel ils prônent des assouplissements du statut du fermage conjoint à la création d’un « permis d’exploiter ». Dans cette fenêtre de tir, les quelques parlementaires, pas effarouchés par un sujet aussi complexe et peu gratifiant, doivent rendre les conclusions de leur mission dès l’été.

D’une prudence de Sioux, le syndicalisme agricole majoritaire mesure bien la difficulté d’accorder propriétaires et fermiers, lorsqu’on rentre dans les détails pratiques… En fait, le plus grand risque serait de reproduire les bonnes vieilles méthodes : quelques articles « cavaliers » glissés çà et là dans la future loi agricole issue des États généraux de l’alimentation. Mais qui ne s’attaqueraient pas au fond.