La route traverse des paysages de prairies parsemées de vaches. Ici, les bovins sont rois. L’Uruguay en compte pas moins de douze millions, pour seulement trois millions d’humains. Dans le département de San José, dans le sud-ouest du pays, la maison d’habitation et les bâtiments qui l’entourent sont posés sur une hauteur, dominant le bon millier d’hectares de l’exploitation d’Alejandro Tedesco et de son fils Ignacio. Ils en possèdent une seconde, située à quelques kilomètres, qui compte près de 1 500 hectares.

Le domaine Don Alfredo familia Tedesco a été créé par le grand-père d’Alejandro dans les années 1950. Basque d’origine, le mouton était pour lui une évidence, même dans une région dominée par l’élevage laitier. 63 % des 2 500 ha que comptent les deux exploitations sont occupés par de la prairie naturelle, avec cette herbe riche qui fait la qualité de la viande des élevages d’Amérique du Sud.

Les deux sites abritent trois troupeaux : des vaches, évidemment, laitières et allaitantes, et des ovins. Leur alimentation est basée sur l’herbe, mais les laitières reçoivent un peu de maïs. On est loin des feed lots, qui suscitent ici la critique et jettent l’opprobre sur tout l’élevage du Mercosur. En Uruguay, cette façon de faire représente un pourcentage dérisoire de la production. L’ensemble est suivi par deux responsables d’exploitation, quatre ouvriers et un ingénieur agronome. Un vétérinaire, le docteur Jorge Bonino Morlan, veille au bon état sanitaire des trois cheptels.

Un suivi sanitaire pointu

Plus encore que les bovins, c’est le troupeau de moutons corriedale qui fait la fierté de la ferme. La race est originaire d’Australie et de Nouvelle-Zélande. Le cheptel comprend 305 béliers reproducteurs et 2 405 brebis, pour un troupeau global de 5 589 têtes. En plus de la viande, les éleveurs produisent de la laine. La tonte se fait en hiver, entre la mi-juillet et la mi-août. Chaque animal en donne, en moyenne, 4,3 kg, pour une production de 25 941 kg l’an dernier, avec un diamètre moyen des fibres de 28,1 micron.

Côté sanitaire, le principal problème reste le parasitisme. Des analyses coprologiques sont effectuées régulièrement. En décembre-janvier, pendant l’été de l’hémisphère Sud, les moutons sont baignés pour être traités contre les poux et les parasites externes. Simultanément, ils sont vaccinés contre l’ecthyma et la coccidiose. « Du fait de la taille du troupeau, les contrôles sont les plus rationalisés possible, indique le vétérinaire. Nous avons mis en place une politique préventive pour éviter les problèmes. »

L’élevage est équipé de systèmes de contention, de bains, de petites constructions facilitant l’examen des animaux, ou leur éventuelle mise en quarantaine. Il est également doté d’une bonne génétique, avec des critères de sélection qui portent en priorité sur la qualité de la laine, sa couleur, la plus blanche possible, et la qualité des aplombs. « Nous vendons des reproducteurs, explique Alejandro Tedesco. C’est aussi une raison pour laquelle nous travaillons beaucoup sur la génétique. »

L’Europe en ligne de mire

Les deux exploitations abritent 54 taureaux et plus de 2 000 vaches, une moitié d’allaitantes, l’autre de laitières. Pour les premières, la mise à la reproduction se fait à l’âge de deux ans. Elle se déroule de novembre à janvier, avec un taux de reproduction de 88 %. Les veaux sont retirés pour le sevrage à deux mois et 60 kg. « Afin de laisser aux mères le temps de récupérer avant d’être à nouveau mises à la reproduction », explique l’éleveur. Le cheptel est constitué de deux races d’origine anglaise, polled hereford et angus. Là encore, un suivi génétique est assuré depuis 2006 pour les deux.

Quant aux laitières, il s’agit de la race hollandaise, la plus répandue en Uruguay. La production globale atteint 1,22 million de litres par an et une moyenne de 22 litres par vache et par jour. Là encore, Alejandro et Ignacio Tedesco recherchent la performance. L’élevage est inscrit au contrôle laitier depuis plus de vingt ans.

Le but de toutes ces attentions est évidemment de pouvoir exporter, et ceci pour toutes leurs productions. Les marchés asiatiques et nord-américains sont déjà accessibles. Alejandro et Ignacio Tedesco espèrent que les portes de l’Union européenne s’ouvriront aussi. Myriam Guillemaud