Dans la cour de cette exploitation laitière de Roville-devant-Bayon, en Meurthe-et-Moselle, se trouvent du matériel de manutention et des outils de travail du sol d’une couleur verte peu commune. Difficile de croire que tous ces engins ont été imaginés et fabriqués par un adolescent. Paul Champouillon vient tout juste de souffler ses 18 bougies mais il est loin d’être un novice en construction. Au pied d’un silo se trouve sa première œuvre, un pique-botte. « Je l’ai construit à 13 ans, explique le jeune surdoué. À l’époque, je soudais encore à la baguette et je vois, aujourd’hui, les petits défauts de l’outil. » Paul a la mécanique dans le sang. « J’ai appris à souder tout seul, mes parents m’ont toujours laissé faire. Tout petit, je me suis fabriqué une cabine pour mon tracteur à pédales et une remorque derrière mon vélo. » Après le premier pique-botte, Paul s’initie à la soudure au Mig et passe à l’étape supérieure, la réalisation d’une fourche à ensilage pour le télescopique de la ferme. Le vibroculteur sera l’étape suivante. « J’ai conçu cet outil avec six rangées de dents, en m’inspirant de ce que propose Costa (lire encadré). Je vais être honnête, mon père m’a aidé sur cette première réalisation de grande ampleur en dessinant les plans », confie Paul. L’engin est une réussite et il se sent pousser des ailes.
Conception de A à Z
« En 2017, mon père était à la recherche d’une solution pour déchaumer nos sols gras. Mais les outils du commerce nous semblaient beaucoup trop chers. Je me suis donc lancé dans la conception de ma propre machine », se souvient Paul. Contrairement au vibroculteur, il ne s’inspire d’aucune autre machine et, surtout, travaille sans plan. Il part d’abord sur une version repliable, puis se rend vite compte du poids de l’engin et revoit ses ambitions à la baisse. « Mon objectif, c’est toujours de faire un engin costaud. Le châssis est en acier HLE et les poutres en 100 x 100 x 8. L’ensemble de 3,50 m pèse 3 t. » Paul a renforcé les angles avec des cornières et opté d’emblée pour un très grand dégagement. L’engin regorge de petits détails qui simplifient la vie du chauffeur. Par exemple, la chappe est orientée vers le bas pour augmenter la hauteur de relevage. La sécurité est hydraulique et il est possible de relever les dents extérieures pour terminer la parcelle. « J’ai opté pour une herse libre, plutôt que des disques, afin de réduire le coût », précise Paul. Le déchaumeur a déjà 300 heures.
Des ventes par Internet
Paul a aménagé l’un des hangars de la ferme en atelier. En ce moment, on y trouve trois fourches à ensilage en préparation pour des clients rencontrés grâce à sa page Facebook (P.L.C). « C’est une grande marque de confiance de commander une machine à un jeune de 18 ans », apprécie Paul. Il s’est aussi lancé un nouveau défi : construire un semoir pour le semis direct en 6 m avec des dents en T. « J’ai récupéré deux trémies Accord ainsi que leur distribution. Tout le reste, je vais le concevoir. »
Parallèlement, Paul poursuit ses études en BTS ACSE car son objectif principal est de reprendre l’exploitation familiale de 100 vaches laitières et 200 ha. La fabrication de matériel, c’est du bonus car « c’est un plaisir indescriptible de mettre le guidage en route et de regarder travailler l’outil que j’ai fabriqué de A à Z. »