Via le contrôle de performances, le robot de traite ou les systèmes d’analyses du lait en salle de traite, la plupart des éleveurs ont à leur disposition les mesures de la quantité et de la qualité du lait produit. Pour Loïc Quéméré, directeur technique chez Eilyps, « ces données donnent une vision concrète et synthétique. Elles permettent de faire directement le lien avec l’alimentation. Ce sont également des indicateurs essentiels de la santé des vaches et de leur capacité à se reproduire. »

Surveiller de près les débuts de lactation

Souvent considéré comme l’étape la plus importante du cycle de production, le début de lactation nécessite un suivi à l’échelle de l’individu.

Le taux butyreux (TB) au premier contrôle (un mois après vêlage) est un indicateur de mobilisation des réserves corporelles. Une vache puisant dans ses réserves en début de lactation va enrichir son lait en matière grasse. « Au premier contrôle, un TB supérieur à 45g/kg est un signe d’amaigrissement important, souligne Marc Ennuyer, ancien vétérinaire dans la Somme. C’est généralement le cas des vaches trop grasses au vêlage ou montrant des problèmes d’ingestion après la mise bas. D’où l’intérêt d’évaluer l’état d’engraissement et le remplissage du rumen dès le tarissement. »

Le taux protéique (TP) mini est le point minimum du taux de protéines du lait au cours de la lactation, apparaissant entre le 1er et le 2e mois après le vêlage. Il est principalement expliqué par un déficit énergétique. En effet, la synthèse protéique exige un apport simultané d’énergie et d’azote. « Si le TP mini est inférieur à 28 g/kg en race prim’holstein et 30 g/kg pour les autres races, cela indique un déficit énergétique trop prononcé, note Marc Ennuyer. Les risques de problèmes métaboliques, comme l’acétonémie, et de troubles de la reproduction en sont accrus. »

Le rapport TB/TP est une analyse conjointe des taux de matière utile en vue de détecter des maladies métaboliques. Sachant que le TB tend à augmenter avec l’amaigrissement (mobilisation des réserves) et que le TP tend à diminuer avec le déficit énergétique (besoins en énergie pour la synthèse protéique), « un rapport TB/TP supérieur à 1,4 en début de lactation est caractéristique d’une acétonémie subclinique, analyse Marc Ennuyer. Si une telle situation se présente sur plus de 20 % du lot de vaches en début de lactation, il faut traiter le problème de fond, c’est-à-dire faire le point sur l’alimentation avant et/ou après le vêlage. Il ne s’agit pas de transformer les vaches en pompes à propylène ! »

Analyser à l’échelle du troupeau

Dans la plupart des élevages, une même ration de base est distribuée à l’ensemble des vaches. Il est donc intéressant d’en vérifier les paramètres essentiels, comme la fibrosité, pour prévenir par exemple le risque d’acidose.

L’écart TB-TP est le premier marqueur à contrôler à l’échelle du troupeau, conjointement à la quantité de lait produite. Il permet rapidement de vérifier l’équilibre de la ration ainsi que sa fibrosité. « Une ration équilibrée doit présenter un écart TB-TP de 6 à 8 points », note Marc Ennuyer. La prévention du risque d’acidose demeure une préoccupation importante dans les élevages. Le praticien précise : « L’un des signes d’acidose est la diminution du TB. Un écart TB-TP inférieur à 3 points est considéré à risque sur ce critère. Il convient alors de vérifier la fibrosité de la ration. »

Le taux d’urée reflète l’apport et l’utilisation de l’azote dégradable de la ration. Parce que chaque animal a ses propres caractéristiques physiologiques pour la vitesse d’évacuation de l’urée, son analyse doit impérativement se faire à l’échelle d’un groupe de vaches ou du troupeau. « Les taux optimaux d’urée se situent entre 250 et 330 mg/l de lait, affirme Marc Ennuyer. Les primipares présentent souvent une urémie assez basse, en raison d’un métabolisme protéique spécifique lié à leur croissance, qui n’est pas encore achevée. »

L’équilibre énergie/azote de la ration peut s’appréhender par l’analyse du taux d’urée en fonction du TP. Cette approche peut être réalisée sur un groupe d’animaux au même stade du cycle de production. Selon le stade et les déséquilibres, les risques diffèrent (voir infographie).