Associer pastoralisme, vente directe et bio, voilà l’objectif partagé par Melchior Laboissière et Ulysse Robin au sein du Gaec L’Odyssée des bergers, à Lafage, dans l’Aude. Ils se sont connus à Florac, en Lozère, dans le cadre d’une année de licence sur la gestion agricole des espaces naturels. « En stage, des éleveurs passionnés m’ont décidé à reprendre la ferme familiale », raconte Melchior, qui s’est installé le premier, en 2013. Il a alors fait évoluer le système de ses parents, qui produisaient des agneaux de bergerie en coopérative. « Je suis revenu à un agnelage par brebis avec deux lots, l’un agnelant en février et l’autre en août, raconte-t-il. J’élève les agneaux sous la mère et à l’herbe sur des prairies multi-espèces, avec un petit complément en grain, distribué au pré. Leur viande est savoureuse. »
Deux sites à 6 km
Dans un premier temps, Ulysse a rejoint Melchior sur la ferme comme salarié. Ensemble, ils ont développé la vente directe. « Je voulais m’installer à mon tour, explique-t-il. Nous avons envisagé d’agrandir le troupeau, puis de créer un deuxième atelier avec des chèvres, avant d’opter pour des brebis laitières. Au marché où je comptais vendre, il y avait déjà des fromages de chèvre et aucun de brebis. » Prudents, les deux éleveurs ont préféré créer ce nouvel atelier sur un deuxième site, au cas où ils seraient amenés à se séparer un jour. « S’associer en Gaec, c’est une aventure humaine ! », lance Melchior. En 2017, Ulysse s’est donc installé sur 23 hectares de terres situées à 6 kilomètres, sur lesquels le Gaec a investi 130 000 euros dans une bergerie et une fromagerie.
Ulysse Robin fabrique des tommes affinées, des fromages frais et des yaourts au lait de brebis. © F. Ehrhard
Avant de pouvoir démarrer les travaux, il a fallu un an de démarches pour obtenir l’autorisation de construire et amener l’eau et l’électricité. « J’ai commencé à traire en 2018, poursuit Ulysse. Caler les fabrications m’a demandé du temps. Désormais, la qualité est au rendez-vous et nous manquons de yaourts et de fromages pour répondre à la demande. » L’éleveur trait de février à août, en monotraite pour alléger le travail. En 2021, il a transformé 10 000 litres de lait et, en 2022, il compte monter à 12 000 litres.
Le Gaec commercialise des agnelets et des agneaux par la coopérative. En direct, les ventes sont groupées sur juin et juillet, une période où il y a de la demande pour les grillades, et sur novembre et décembre, avant les fêtes de fin d’année. L’abattage et la découpe se font en prestation à Pamiers, dans l’Ariège. « Nous y faisons transformer nos brebis de réforme en saucisses et merguez, explique Melchior. Avec ces produits aussi, nous n’arrivons pas à satisfaire la demande. »
Au quotidien, chacun gère son troupeau. « De janvier à août, nous nous entraidons ponctuellement, confie Ulysse. Melchior trait quand je suis au marché et, de mon côté, je l’aide à trier des agneaux. » De septembre à décembre, la charge de travail s’allège et leur permet de travailler plus ensemble. « Durant cette période, nous nous relayons, pour prendre chacun trois semaines de vacances », relate Melchior.
Pour le troupeau allaitant, les deux associés ont choisi une race rustique, la rouge du Roussillon. © F. Ehrhard
En 2022, les associés ont prévu d’embaucher une salariée à temps partiel. « Je vais la former pour qu’elle puisse assurer seule la traite et la transformation lorsque j’ai besoin d’aider Melchior, ajoute Ulysse. Nous pourrons ainsi nous réorganiser, afin de travailler plus souvent ensemble, malgré l’éloignement des deux sites. »
Un bon réseau de vente
Au sein du Gaec, les éleveurs mutualisent la communication et les ventes. « Au marché, par exemple, j’informe les clients des périodes où ils peuvent acheter des agneaux », indique Ulysse. Quant à Melchior, il propose des tommes à ceux qui commandent des colis de viande. Cette synergie permet d’accroître les débouchés pour les viandes et les fromages.
Les circuits de commercialisation sont diversifiés. Ulysse fait un marché par semaine et livre régulièrement sept boutiques locales, ainsi qu’une Amap et une association de producteurs bio à Toulouse. Pour les agneaux, Melchior planifie deux livraisons en juin à Toulouse et à Montpellier et une en décembre à Toulouse, complétées par des ventes locales : « Notre fichier compte désormais 400 à 500 clients particuliers. Nous allons les inviter à une journée portes ouvertes en 2022. »