« On est bien conscients qu’à un moment, les prix des matériels seront tellement élevés que les agriculteurs ne pourront plus investir », s’est inquiété Loïc Morel, le nouveau président du Sedima, le syndicat des concessionnaires de matériels agricoles et espaces verts, lors d’une conférence de presse ce 28 juin 2021 à Paris.
« Avec la flambée des prix des matières premières et la tension sur le fret maritime, les prix des machines agricoles s’envolent, a-t-il poursuivi. Et plus une machine intègre d’acier ou de semi-conducteurs, plus son tarif explose. » Sans surprise, les constructeurs répercutent cette flambée sur les concessionnaires, et donc par ricochet sur les agriculteurs. Avec parfois une tendance à anticiper un peu trop fortement la hausse, selon le Sedima.
« Nous ne contestons pas l’augmentation générale, qui est justifiée au regard de la tension sur les matières premières, affirme Loïc Morel. En revanche, nous sommes moins d’accord avec certains constructeurs qui trouvent des astuces pour augmenter fortement les tarifs par précaution. »
Impact direct sur les devis
Selon le Sedima, la hausse varie de 3 à 20 % en fonction des constructeurs. Ceux qui emploient beaucoup d’acier et font venir des composants de Chine sont les plus impactés. « Certaines augmentations se font par petits paliers de 1 à 2 %, mais un constructeur vient d’imposer une hausse brutale de 18 %, déplore Loïc Morel. Et il ne se passe pas une semaine sans augmentation de tarif. »
La hausse est parfois tellement rapide que le prix d’une machine augmente entre le moment de la signature du devis et celui du passage de la commande, si l’accord de la banque tarde un peu trop.
« Le mot d’ordre donné aux commerciaux est d’indiquer aux agriculteurs que le délai du devis est réduit, précise Anne Fradier, secrétaire générale du Sedima. Il s’agit d’une transaction entre professionnels et il n’est pas possible d’annuler un bon de commande. C’est alors au concessionnaire de s’adapter pour limiter l’impact sur son client. »
Des délais qui s’allongent
L’autre conséquence de la pénurie de matières premières et de la fermeture de certaines usines, faute de composants, est l’allongement des délais d’approvisionnement. Huit concessionnaires sur dix sont confrontés à des retards importants. « Sur certaines marques et certaines catégories de matériels, il commence à avoir des pénuries et les pièces détachées ne sont pas épargnées, précise Loïc Morel. Certains retards atteignent déjà 8 mois et il n’y a pas de lumière au bout du tunnel. Des constructeurs ne sont plus du tout en mesure de livrer. »
À moyen terme, c’est aussi la trésorerie des concessions qui pourrait en pâtir car beaucoup sont tentés de faire des stocks par précaution et anticipent les commandes d’un an, « alors qu’on ne sait pas où seront les prix dans 18 mois ». Avec des délais aussi longs, les éventuelles reprises de matériels sont impactées.
« Nous conseillons aux agriculteurs de continuer à entretenir ces engins amenés à quitter l’exploitation, surtout si le délai de livraison est long, insiste Loïc Morel. Le cas échéant, le montant de la reprise sera réévalué. Les agriculteurs doivent aussi savoir que s’ils ne trouvent pas un matériel neuf dans les délais, il y a une solution de repli avec l’occasion. »