Blés : gros achats mais petits prix
Le marché du blé a été marqué cette semaine par l’achat de 570 000 tonnes par l’Algérie (pour chargement en février) et par l’appel d’offres de 480 000 tonnes lancé par l’Arabie Saoudite (pour livraison en février-avril). Le « tender » de l’Arabie Saoudite a contribué à raffermir les cours du blé US, assez bien placé en termes de prix (sur ce créneau qualitatif élevé) pour empocher une part de l’achat. Ce rebond outre-Atlantique a également été porté par des estimations revues à la baisse pour les semis de blés d’hiver aux États-Unis, et par les conditions relativement sèches dans les grandes zones de production US.
En Europe, ce sont habituellement l’Allemagne, la Pologne et les pays baltes qui se partagent le débouché saoudien, mais les prix élevés en Allemagne et en Pologne limitent actuellement l’accès à ce marché, laissant la place aux blés baltes. Le blé français n’a pas grand-chose à espérer sur l’Arabie Saoudite, mais devrait remporter une bonne partie de l’achat algérien, un débouché traditionnel pour le blé tricolore.
Pourtant, cela n’est pas suffisant pour tirer les prix à la hausse : le blé argentin reste en embuscade et sa bonne compétitivité actuelle (ainsi que la qualité apparemment très satisfaisante de la récolte en cours) devrait lui permettre de rafler une partie non négligeable des achats algériens à venir. Par ailleurs, le blé français ne peut se permettre de dévisser en compétitivité face aux blés de la zone de la mer Noire s’il veut s’assurer une présence conséquente sur le Maroc, dont la campagne d’importation vient de débuter.
Autant de raisons qui expliquent que le rendu Rouen cède une nouvelle fois près de 2 €/t, à 153 €/t (–1 €/t pour les places de La Pallice, Creil, et en Fob Moselle). Deux éléments pourraient apporter une petite bouffée d’oxygène. D’abord, l’annonce de grosses tempêtes sur le sud-est de l’Australie, l’une des grandes zones de production de blé du pays, qui pourrait dégrader plus encore la production australienne déjà attendue en forte baisse après le record de l’an dernier. Ensuite, la remontée progressive des coûts de fret internationaux, au plus haut depuis quatre ans : cela pourrait (un peu) compliquer la tâche de l’Argentine pour la conquête des débouchés africains, mais ne réglera en rien la féroce concurrence exercée par la Russie depuis le début de la campagne.
Orge fourragère : bataille France/mer Noire dans la guerre à l’exportation
Le marché de l’orge fourragère est toujours dominé par la compétition que se livrent les origines UE (principalement France) et la mer Noire. La concurrence est d’autant plus vive que l’Arabie Saoudite vient d’acheter 720 000 tonnes, et la Jordanie 100 000 tonnes. Il s’agit donc pour les principaux fournisseurs mondiaux de s’assurer une bonne part du gâteau pour éviter la constitution de surplus. En outre, le marasme sur le marché du blé tendre n’est pas de nature à supporter les cours de l’orge fourragère. Ces derniers s’érodent donc une fois encore cette semaine, à 150,5 €/t rendu Rouen (–0,5 €/t) et à 145,5 €/t Fob Moselle (–1 €/t).
Les orges de brasserie (Fob Creil) se maintiennent à 197 €/t pour l’orge de printemps et à 157 €/t pour celle d’hiver. En Australie, la moisson est interrompue par des pluies dans l’est du pays créant des inquiétudes concernant une dégradation de la qualité brassicole des orges. Cet élément, s’il se confirme, pourrait soutenir ponctuellement les primes brassicoles françaises.
Maïs : et l’UE importait, importait…
Les cours du maïs évoluent peu cette semaine, tant en France (la cotation Fob Bordeaux gagne 1 €/t et le Fob Rhin 2 €/t) que sur le marché mondial. Le marché du maïs reste plombé par l’abondance des disponibilités mondiales, en l’absence d’incidents climatiques affectant le développement des maïs dans l’hémisphère Sud. La situation reste néanmoins un peu sèche en Argentine et en Afrique du Sud. Des pluies sont annoncées mais la météo de décembre va être cruciale.
Dans l’UE, la récolte peine à se terminer dans le nord de l’Allemagne et de la Pologne alors que les importations en provenance des pays tiers continuent d’arriver à un rythme soutenu : depuis le 1er octobre dernier, l’UE a en effet importé 2,5 Mt de maïs en provenance des pays tiers contre 1,6 Mt sur la même période l’an dernier.
La faiblesse de la demande pèse sur les cours du soja US
Les cours du soja sur le marché à terme de Chicago reculent cette semaine d’un peu plus de 4 $/t sur le rapproché (échéance de janvier 2018). Les ventes US toujours décevantes (moins de 1 million de tonnes la semaine dernière) et le manque de compétitivité face aux exportateurs sud-américains pèsent sur les prix de la fève nord-américaine. Des pluies bénéfiques en Argentine ont par ailleurs partiellement rassuré les opérateurs. Enfin, l’agence américaine de l’environnement (EPA) a annoncé une stabilité des mandats de biodiesel de 2019, alors que le marché attendait plutôt une hausse. Cela a aussi pesé sur le prix de l’huile (et par ricochet de la graine). Sauf pertes de récoltes au Brésil et en Argentine, nous attendons toujours un recul des prix au début de l’année prochaine.
Les prix du colza poursuivent leur chute
De nouveau cette semaine, les prix du colza sont en baisse sur le marché français. Le prix rendu Rouen perd ainsi 4 €/t, tandis que le colza Fob Moselle voit son prix diminuer de 6 €/t. Sur le marché à terme, les cours sur Euronext sont en recul de 6,5 €/t, à 367,75 €/t.
L’euro reste fort face au dollar, mais évolue peu cette semaine. Les cours des huiles ont reculé, faisant suite à l’annonce de l’Inde d’augmenter ses droits d’importation sur les huiles végétales (avec une possible baisse de demande dans les prochaines semaines). Cela pèse donc sur les prix des graines d’autant plus que les prix du canola canadien sont aussi en recul. Ils perdent en effet presque 9 $/t cette semaine. L’office de la statistique va publier la semaine prochaine ses estimations de récolte, chiffres très suivis par le marché (une hausse des estimations est attendue). Il est à noter toutefois que les fortes pluies annoncées en Australie pourraient dégrader les cultures non encore récoltées (le blé est toutefois plus concerné que le colza).
Le prix du tournesol est en baisse de 5 €/t cette semaine, à 320 €/t à Saint-Nazaire, dans le sillage du cours des huiles.
Bonne résistance des tourteaux
Le prix du tourteau de soja sur le CBOT est quasi inchangé cette semaine, à 358 $/t. Les prix résistent donc à la baisse des cours de la graine, avec une bonne demande animale sur le rapproché. Les prix français sont eux aussi proches de la semaine dernière, avec la cotation à Montoir à 317 €/t.
Le prix du pois fourrager est inchangé cette semaine à 175 €/t départ Marne, tandis que le prix du pois jaune rendu Rouen recule de nouveau à 182 €/t (–1,5 €/t), après la forte chute de la semaine dernière.
À SUIVRE : rythme de vente des sojas US, pluies en Amérique du Sud (fin du temps trop sec) et tempête en Australie (dégradation possible des cultures non récoltées), chiffre de récolte de canola au Canada, taux de change et remontée des taux de fret.