La chimie, on veut l’éliminer, mais je pense que c’est une grave erreur. il faut qu’elle soit raisonnée », a-t-il poursuivi lors de cette table-ronde organisée le 17 octobre 2019 en clôture d’un colloque de l’AFBV, Association française des biotechnologies végétales. Dans ce cadre-là, la génétique et les biotechnologies ont leur rôle à jouer pour créer des variétés résistantes aux bioagresseurs. Mais pas que...
Pourquoi ? Parce que ces résistances sont parfois contournées. « Il faut donc mettre en œuvre des pratiques culturales pour limiter la pression de parasites et diminuer l’apparition de contournement de résistance, a souligné Philippe Viaux, membre de l’Académie d’agriculture. Il existe aussi des méthodes curatives, comme le désherbage mécanique. Pour lui, une chose est sûre : « Si on ne diminue pas l’utilisation des produits phyto, on va vers leur interdiction. »
« Ne pas créer de cloisons »
« Je ne suis pas étanche aux recherches, bien au contraire, a estimé de son côté Gérard Michaut, producteur en agriculture biologique et président de l’Agence bio. Le décryptage du génome va aider tous les agriculteurs, qu’ils soient conventionnels ou bio. il faut aussi changer les méthodes et arrêter par exemple de n’avoir que trois cultures sur une ferme. »
« Tout ce qu’on peut mettre en œuvre, que ce soit la génétique, le chimique (raisonné !), le biologique, tout sera bon à l’avenir, poursuit-il. Il ne faut pas créer de cloisons, unissons-nous pour que demain nous puissions encore faire de l’agriculture en France », a-t-il lancé.
« Il y a certes une complémentarité à avoir, mais aussi une hiérarchie à respecter », fait remarquer Philippe Gate, directeur scientifique d’Arvalis. Avec au départ, les mesures prophylactiques, la lutte mécanique, le biocontrôle puis la lutte chimique. « À chaque fois qu’une étape est franchie, il faut regarder son efficacité vis-à-vis des bioagresseurs, recommande Philippe Gate. C’est un exercice à faire si on veut diminuer l’utilisation des molécules. »
Autorisation rigoureuse des produits de biocontrôle
Pour Eugénia Pommaret, directrice générale de l’UIPP, l’Union des industries de la protection des plantes, « on doit jouer sur différents leviers », citant par exemple l’apport du biocontrôle en complément des produits phyto. Et de rappeler que le marché du biocontrôle qui pèse 5 % aujourd’hui devrait grimper à 15 % en 2025.
Mais pour Catherine Régnault-Roger, de l’Académie d’agriculture, « tous les produits de biocontrôle ne sont pas anodins. Il ne faut pas les encenser mais montrer leurs limites s’il y en a. » Autrement dit : « Il faut peser le pour et le contre avant de les utiliser et que l’autorisation qu’on leur accorde soit aussi rigoureuse que les procédures d’homologation des produits phyto de synthèse. Il convient d’avoir les moyens de juger de leur efficacité et ne pas les autoriser à tout-va sous prétexte qu’ils sont naturels », estime-t-elle.