Des insectes dans les mangeoires, c’est sans doute le régime alimentaire du futur pour nombre d’animaux d’élevage. Pionnier dans ce secteur, le groupe néerlandais Protix vient d’inaugurer une usine à larves d’insectes, destinée à produire des aliments protéinés pour le bétail. Dédié à l’élevage des mouches soldat noires, ce site de production de 15 000 m2 serait l’une des plus grosses usines à insectes du monde. L’investissement a porté sur quelque 40 M€, sans compter la valeur d’une dizaine de brevets déposés.

Développement durable

Les produits finis, sous forme de farines protéinées et de lipides, sont notamment destinés aux élevages de porcs et de poulets. Mais surtout, l’usine de Protix va fournir des aliments en droite ligne avec les exigences de développement durable que doit relever le secteur de l’élevage.

La FAO (1) considère que les insectes pourraient avantageusement remplacer les farines de poisson et les tourteaux de soja, jusqu’à présent utilisés dans les élevages. Aujourd’hui, un tiers des terres cultivées au niveau mondial sont dédiées à des cultures pour sustenter le bétail.

Face à cela, les aliments de Protix devraient aider à réduire fortement les importations de soja en provenance d’Asie. « Cette usine va permettre de combattre les effets négatifs liés à l’utilisation du soja, qu’il s’agisse des coûts de transport de cette denrée ou de la déforestation pour pratiquer cette culture », a estimé la ministre de l’Agriculture néerlandaise lors de l’inauguration du site.

Écologique à plus d’un titre, la nouvelle usine de Protix s’avère aussi en phase avec l’économie circulaire. Les insectes destinés à produire les larves protéinées sont en effet nourris à partir de restes d’aliments végétaux provenant d’exploitations agricoles voisines de l’usine.

Malgré tout, la réglementation européenne demeure restrictive en matière d’alimentation des animaux d’élevage. Depuis l’épidémie de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dite maladie de « la vache folle », le bétail ne peut pas, en principe, être élevé avec des aliments provenant d’autres animaux. Mais des exceptions montrent que la brèche est ouverte.

« Meilleure croissance »

Ainsi, l’alimentation des poulets d’élevage peut aujourd’hui contenir des vers vivants. Un élevage de porcs néerlandais, situé à Waalwijk (province du Brabant Nord), bénéficie d’une dérogation. Son exploitant, Theo Klijn ajoute, s’il le souhaite, de l’huile de larves à l’alimentation de ses bêtes. « La croissance de mes porcs s’en trouve améliorée. Ils sont moins malades, ce qui réduit l’utilisation de médicaments dans mon exploitation. »

À l’instar de Protix, le groupe français Ynsect est également à pied d’œuvre à Amiens (Somme) pour produire des protéines à base d’insectes. Une usine ultramoderne devrait d’ici peu voir le jour, avec l’objectif de fournir 20 000 t par an de protéines animales à partir d’élevage de vers de farine. Pour l’heure, le prix d’achat de protéines d’insectes surpasse celui des protéines de soja.

Par notre correspondant, Didier Burg

(1) Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture.