« J’appelle le gouvernement français à mettre la même énergie pour défendre la Pac que dans la loi sur l’alimentation », a lancé Claude Cochonneau, le président des Chambres d’agriculture, lors de l’ouverture du débat sur l’avenir de la future Pac.
Lier enjeux environnementaux et viabilité
La Commission propose d’établir des objectifs environnementaux ambitieux qui entraîneront des changements de stratégie pour les agriculteurs. « C’est une boîte vide que devront remplir les États, explique Luc Vernet, cofondateur du think-tank Farm Europe. Tous n’auront pas les moyens d’aller vers la transition environnementale. » Jean-Baptiste Moreau (LREM), député et rapporteur du projet de loi sur les EGA, estime aussi que « la préservation de l’environnement n’a de sens qu’au niveau européen ».
Un volet économique plus fort est nécessaire. « La Pac doit accompagner les changements de pratiques pas seulement par une compensation de la baisse de revenu comme actuellement, mais par une couverture du risque qui est pris par l’agriculteur », explique Luc Servant, président de la chambre d’agriculture de la Charente-Maritime.
Des craintes ont également été exprimées lors des débats concernant le risque de renationalisation, la réelle simplification apportée par la réforme et le manque d’ambition de la Commission concernant la gestion des risques et des crises.
Négocier le budget entre États
Malgré tout, la question du budget alloué à la Pac reste centrale. Les chefs d’État des 27 devront se mettre d’accord à l’unanimité. Pierre Bascou, directeur de la direction durabilité et aide au revenu, à la direction générale de l’agriculture de la Commission européenne, a précisé que la Commission veut « introduire plus de performance et plus de flexibilité », pour un budget « plus efficace et efficient ».
Luc Vernet a exprimé son inquiétude quant à la baisse annoncée qui devrait impacter directement le revenu des agriculteurs. « En 2027, la valeur de l’aide directe devrait baisser de 20 %. L’accès aux aides sera plus compliqué et cela pourrait entraîner une baisse supplémentaire de 5 à 10 % du revenu », a-t-il ajouté.
Ne pas se presser
Pour Pierre Bascou, pas de doute, il faut emporter un accord politique d’ici au printemps de 2019, sinon « nous risquons de perdre quelques années. Mais il est vrai que les délais sont extrêmement serrés », concède-t-il.
Le député Jean Baptiste Moreau n’est pas de cet avis. « Je presse le gouvernement de ne pas se presser, déclare-t-il. Il faut un cadre budgétaire pluriannuel avant les élections, mais prenons le temps pour réformer en profondeur et remettre au centre les agriculteurs et les filières. Un mauvais accord sur la Pac perçu comme défavorable par les agriculteurs, n’aurait pour effet que d’accélérer la disparition de l’Europe. » Selon lui, « les plans de filières issus des EGA (1) doivent s’intégrer dans le cadre stratégique européen pour construire une vraie Pac au service des agriculteurs ».
Les discussions avec la Commission sur le fond de la réforme ont commencé, et seront ouvertes bientôt avec le Parlement européen. En ligne de mire pour la Commission, les élections européennes prévues au printemps de 2019.
(1) Association des journalistes de l’agriculture et de l’alimentation.