Vous pensiez tout savoir sur l’homologation des matériels, leur immatriculation et les poids autorisés ? Détrompez-vous car les règles viennent de changer, avec l’entrée en vigueur du règlement européen 167/2013. Voici ce qui attend votre matériel roulant pour les prochaines années.
> Qu’est ce que le règlement européen 167/2013 ?
Jusqu’à présent, une réception nationale était nécessaire pour mettre en vente un matériel dans un pays. Pour un constructeur qui souhaite exporter dans 20 pays européens, cela signifiequ’il faut procéder à 20 homologations, avec des niveaux d’exigence spécifiques et des coûts élevés pour chacun. Le 167/2013 UE vise à supprimer ces différences en instaurant une réception européenne. Concrètement, elle sera réalisée dans un pays, avec les niveaux d’exigences définis par le 167/2013 UE, et valable dans toute l’Union.
> Quels sont les matériels concernés ?
Le 167/2013 UE distingue trois catégories de matériels : ceux pour lesquels l’homologation européenne est obligatoire (tracteurs standard et étroits), ceux pour lesquels elle est optionnelle (enjambeurs, chenillards, remorques et engins tractés) et ceux qui ne sont pas concernés par ce règlement, comme les automoteurs de récolte et bien sûr les outils portés. Lorsque le règlement est optionnel, le constructeur peut choisir entre une réception nationale et une réception européenne pour chaque série de matériels.
> Quand entre-t-il en vigueur ?
La réception européenne est entrée en vigueur le 1er janvier 2016 pour les nouveaux types de véhicules, c’est-à-dire les nouvelles séries qui n’ont pas fait l’objet d’une réception précédemment. Elle concernera tous les véhicules neufs, même s’ils ont déjà été réceptionnés et commercialisés, à partir de 2018.
> Quelles sont les évolutions notables ?
« Les évolutions importantes concernent les gabarits des véhicules, notamment les PTAC et les largeurs (voir infographie ci-contre), explique Guillaume Bocquet, responsable du pôle technique d’Axema (1). Sur cet aspect de dimensions et masses, il faut retenir que les exigences européennes sont plus restrictives que les françaises. Néanmoins, comme ce matériel est soumis au règlement de manière optionnelle, libre au constructeur de réceptionner son véhicule selon la règle française ou européenne. »
> J’ai donc intérêt à acheter une remorque réceptionnée en France plutôt que dans l’UE ?
« Si c’est dans l’objectif d’avoir des PTAC plus importants, la réponse est oui, mieux vaut choisir un matériel réceptionné en France », confirme Guillaume Bocquet.
> Le freinage hydraulique va-t-il disparaître ?
Le freinage hydraulique simple ligne, utilisé sur la plupart des matériels en France, sera interdit sur les tracteurs neufs à partir du 1er janvier 2021. Seuls les systèmes à double ligne seront autorisés, qu’ils soient pneumatiques ou hydrauliques. L’omniprésence du freinage pneumatique dans certains pays comme l’Allemagne risque de plaider fortement en faveur de cette solution technique. De plus, la réception prendra en compte l’équilibre entre le tracteur et le véhicule tracté, avec un niveau d’exigence croissant selon les seuils fixés à 30, 40 et 60 km/h.
Les entrepreneurs des territoires se félicitent de cette décision, qui va dans le bon sens pour la circulation à grande vitesse. En revanche, les agriculteurs qui possèdent un parcellaire très regroupé et empruntent peu la route regrettent le surcoût engendré par le freinage double ligne.
> Quels sont les avantages du 167/2013 pour mon exploitation ?
Le règlement comprend un volet sur l’entretien du matériel : c’est le RMI (Repair et Maintenance Information, c’est-à-dire information sur la réparation et la maintenance). Il oblige le constructeur à mettre toutes les informations nécessaires à la disposition de tous les organismes et opérateurs souhaitant réaliser la maintenance et les réparations. Cela signifie que vous ne serez plus obligé d’aller faire dépanner un tracteur ou un pulvérisateur chez le concessionnaire de la marque, au seul prétexte qu’il faut une valise diagnostic précise ou l’accès à des données de mise à jour. Ce règlement ouvre donc la porte à un retour des mécaniciens indépendants et au développement d’enseignes de réparation « toutes marques ».
> Est-ce exact qu’il faut immatriculer tous les matériels roulants ?
L’immatriculation est obligatoire pour tous les matériels roulants dont le PTAC est supérieur à 1,5 t. « Certains sont encore peu immatriculés, constate Axema. Alors que 89,9 % des bennes et 97 % des moissonneuses-batteuses ont été immatriculées en 2015, 35 % des presses à balles rondes et 60 % des épandeurs à fumier vendus la même année circulent sans immatriculation. »
Pour Trame et Axema, le problème vient surtout d’une habitude qui n’est pas encore entrée dans les mœurs. En outre, beaucoup de propriétaires de matériels qui vont très peu sur la route ne se sentent pas concernés par cette obligation. Par ailleurs, le nouveau service d’immatriculation en ligne (SIV), déjà utilisé pour les tracteurs et les automoteurs et qui devait être accessible fin 2015 pour les véhicules tractés, a été reporté à 2016, ce qui n’aide pas à prendre de bonnes habitudes. Néanmoins, Axema rappelle que l’immatriculation est de la seule responsabilité du propriétaire de la machine et non du constructeur ou du concessionnaire, même si certains vendeurs proposent ce service.
> Je viens de racheter une ferme et les matériels n’ont pas de barré rouge. Comment puis-je les immatriculer ?
« C’est un vrai problème auquel nous ne pouvons pas apporter de solution pour le moment, regrette Nassim Hamiti, chargé de mission agroéquipement à Trame. Lorsqu’on rachète un parc de matériels, le vendeur est rarement en mesure de fournir les barrés rouges (certificats de conformité), d’autant que, dans la plupart des cas, ils n’ont jamais existé. Sans ce barré-rouge, il n’est pas possible d’immatriculer le matériel. La seule solution serait de réaliser une réception à titre individuel pour chaque matériel concerné, ce qui techniquement et financièrement n’est pas envisageable à l’échelle d’une exploitation. »
(1) Union des industriels de l’agroéquipement.