Je vous écris des « Hauts-de-France », nouvelle appellation du Nord-Pas-De-Calais-Picardie, préférée à « Terres du Nord » et « Nord de la France », où ne figurent ni Nord, ni Picardie pour ne froisser personne, dans cette région aux équilibres fragiles : deux tiers de la population et un tiers du territoire ainsi que la capitale pour le Nord, l’inverse et le président pour la Picardie.

Je le conçois, le mot « Nord » n’attire guère, comme nous le firent comprendre les Bretons qui rebaptisèrent les Côtes-du-Nord en Côtes-d’Armor. C’était bien avant le film de Dany Boon Bienvenue chez les Ch’tis, et cette fameuse séquence de Michel Galabru, « Le Nooord… Il y fait - 40° C… »

Après tout, si l’on avait voulu faire un peu plus « fun », comme l’on dit aujourd’hui, « Pays des Ch’tis » n’aurait pas été si mal. D’autant que la langue ch’ti n’est qu’un patois de la langue picarde. Cela n’aurait donc guère froissé les Picards. À la nuance près que des trois départements qui constituaient la Picardie, seule la Somme a une véritable identité picarde. Ne dites pas à un producteur de Champagne de Château-Thierry (le bas de l’Aisne) qu’il est picard, il tombe en syncope. Alors nordiste ! je ne vous dis pas.

À mon goût, Hauts-de-France fait un peu prétentieux ! À l’oreille, Hauts-de-France devient vite Eaux de France. Enfin, le qualificatif haut, qui désigne le relief plus que la position géographique, n’est guère adaptée à l’un des territoires les plus proches du niveau de la mer, et qui n’a rien à envier au plat pays d’outre-Quiévrain. Avec comme seuls horizons, comme le chanterait Brel, les terrils, les beffrois et les flèches des cathédrales gothiques dont cette montagne couronnée de Laon qui surplombe les grandes plaines du Nord-Est et ne rencontrent guère de véritables reliefs avant la Biélorussie… Dernière inquiétude : comment vous, habitants des « Terres du Milieu » ou du « Bas de la France », allez-vous nous appeler : « Hautistes », « Hautains » ou « Hauteurs » ? !