Face à la mortalité accrue des abeilles ouvrières, la fertilité de la reine est essentielle pour le renouvellement de la population et la survie de la colonie. Dans leur communiqué paru ce mercredi, l’Inra et l’Adapi (1) indiquent que certains apiculteurs, pour faire face à une mortalité accrue des reines ces dernières années, « doivent changer systématiquement une partie importante de leur cheptel de reines afin d’éviter la perte de leurs colonies, alors qu’une reine peut normalement vivre de 4 à 5 ans ».

Une chute de la survie

En Avignon, au sein du laboratoire « Abeilles et environnement », des chercheurs de l’Inra ont étudié le comportement des abeilles reines lorsqu’elles sont exposées indirectement à l’imidaclopride (insecticide de la famille des néonicotinoïdes), infectées par le champignon parasite Nosema cerana, ou exposées aux deux stress (insecticide et champignon). Les résultats de leur étude, menée durant deux campagnes (2010 et 2012), ont été publiés ce mercredi.

Ils montrent que l’exposition chronique et indirecte à une dose très faible d’imidaclopride (0,7 ppp, dose à laquelle les abeilles peuvent être confrontées dans la nature), ainsi que l’infection par un parasite commun des abeilles, Nosema cerana, affectent très fortement la survie des reines en conditions naturelles. De plus, l’interaction entre l’insecticide et l’agent pathogène est plus néfaste sur les reines que chaque stress pris séparément. En effet, sur les deux expérimentations menées, entre 90 % et 100 % des reines ont disparu dans un délai de 45 à 90 jours.

Pour obtenir ces résultats, des expérimentations ont été conduites en laboratoire et sur le terrain, impliquant 4 groupes de 10 reines. Un groupe (de reines) a été nourri par des ouvrières alimentées avec du sirop enrichi en imidaclopride, un deuxième a été infecté par le champignon parasite Nosema cerana, le troisième a subi les deux stress, et le quatrième aucun (groupe témoin). Après 8 jours dans ces conditions, les reines ont été installées dans des ruches placées dans des champs non cultivés, afin que les reines puissent sortir s’accoupler et revenir pondre leurs œufs. Chaque reine a été identifiée et sa survie a été notée régulièrement pendant 3 mois.

Des modifications physiologiques insuffisantes

Lors de la deuxième année d’expérimentation (en 2012), l’état physiologique des abeilles a été analysé après les 8 jours en laboratoire et avant leur insertion dans les ruches.

Les résultats montrent que les reines exposées à l’imidaclopride ont, au niveau physiologique, une réponse de protection contre l’action de l’insecticide, et notamment contre le stress dû à l’interaction parasite-insecticide. Cependant, ces mécanismes de protection ne seraient pas suffisants pour éviter leur mortalité prématurée. Dans son communiqué, l’Inra ajoute que « ces résultats pourraient expliquer la perte de la capacité de résilience de la colonie, lorsque la disparition de la reine entraîne l’arrêt de la ponte et donc la production de nouvelles ouvrières ».

A. Cas.

(1) Association pour le développement de l’apiculture provençale.