A peine plus de deux mois avant le sommet mondial COP 21 (21e conférence des parties sur le changement climatique) qui se tiendra à Paris, soixante et un pays ont mis sur la table leur « contribution ». En cumulant leurs engagements en termes de réduction d'émissions de gaz à effet de serre, force est de constater que le compte n'y est pas. Malgré les efforts consentis, la planète serait toujours sur une trajectoire de réchauffement de l'ordre de 3 ou 4°C à la fin du siècle, alors qu'on cible +2°C au maximum.

Pourtant, le cabinet du commissaire européen au Climat, Miguel Arias Cañete, juge « encourageante » la situation politique mondiale. Et souligne déjà que les 61 pays engagés couvrent 62 % des émissions globales, quand le protocole de Kyoto (seul engagement international contraignant existant jusqu'à présent) n'en couvrait que 16 %. Pour autant, « ce dynamisme politique peine à se traduire dans les discussions techniques », reconnaît un membre du cabinet. Les ONG prennent moins de gants pour dénoncer des négociations qui s'enlisent. En témoigne le touffu document de travail que les négociateurs peinent à synthétiser : la dernière réunion à Bonn, à la fin d'août, a seulement permis de le faire passer de 88 pages à... 80 pages. Encore beaucoup trop pour servir de base de négociation en décembre.

Or, pour limiter l'emballement du climat, le rendez-vous de Paris se doit de déboucher sur un accord. « Si on rate cette échéance, ce sera très difficile de rouvrir le dossier ensuite », préviennent en choeur de nombreux spécialistes des négociations. L'Europe, et la France en tant que pays hôte, se démènent pour faire du sommet « COP 21 » un succès. Mais on est loin de l'idée d'un accord à tout prix : « l'Europe ne signera pas n'importe quoi non plus », prévient Bruxelles.

En gros, trois critères devront être remplis :

• Une participation large, incluant au minimum tous les pays du G20 qui couvrent ensemble 80 % des émissions mondiales. Le contexte ayant changé depuis Kyoto, il n'est plus question non plus, cette fois, d'exempter les pays émergents de faire des efforts – certains d'entre eux sont maintenant plus riches que certains pays « développés ».

• Un objectif à long terme de 2°C. L'Europe propose un système dynamique avec révision des engagements des Etats tous les cinq ans, afin d'élever progressivement le niveau d'ambition.

• Un système pour assurer le suivi et la transparence des engagements pris par les Etats.

Si des points de convergence se dessinent, l'adhésion de tous les Etats n'est pas gagnée. Un certain nombre est clairement opposé à l'idée d'un objectif fixé à long terme, défendant plutôt la logique « bottom-up » qui prévaut jusqu'à présent (les contributions viennent d'« en bas », c'est-à-dire de chaque Etat, plutôt que d'être imposées « d'en haut » à tous).

D'autres points d'achoppement persistent, comme la valeur juridique de l'accord : certains ne veulent pas d'objectifs juridiquement contraignants. C'est pourtant ce que souhaite l'Europe. Et surtout les nombreux pays du Sud subissent déjà – et de plus en plus – les effets du changement climatique.

Bérengère Lafeuille