Vous dites que les blés cultivés évoluent vers des profils protéiques plus tenaces permettant, pour ce qui concerne la boulangerie française, de contrebalancer la quantité. Pouvez-vous expliquer ce point ?
Le grain est constitué d'amidon et de protéines. Celles qui intéressent le procédé de panification sont les protéines dites de réserve, ou gluten, constituées des gliadines et des gluténines. Les secondes sont connues pour leur rôle essentiel dans la qualité et l'aptitude des pâtes à être transformées.
Sur le plan génétique, il existe plusieurs types de gluténines qui offrent différentes propriétés plastiques de la pâte. En France, on trouve des gluténines qui confèrent plutôt un caractère extensible (cas de la variété Apache) alors que d'autres donnent un profil plutôt tenace (cas de la variété Arezzo).
Parmi les nouvelles variétés, nous constatons une évolution en faveur du type tenace. Ce qui nous conduit à penser que ce profil permet une meilleure résistance des pâtes malgré la réduction du taux de protéines. Il s'agit toutefois d'une analyse à l'échelle moyenne de la France, ce qui ne veut pas dire que cela solutionne tous les besoins spécifiques liés aux procédés et à la diversité des contextes régionaux.
Au final , le faible taux de protéines , s'il est compensé par leur qualité , constitue-t-il un problème ?
La réponse par une adaptation de la qualité protéique n'est valable que dans certaines situations, comme expliqué ci-dessus, mais c'est très complexe et le résultat n'est pas garanti. Par ailleurs, le meunier français a besoin de diversité, aussi bien de variétés tenaces qu'extensibles. Il faut donc suivre de façon non disjointe la quantité et la qualité des protéines.
En outre, certaines applications, comme le développement de la boulangerie industrielle, requièrent des taux de protéines supérieurs. Cependant, en moyenne et avec la diversité offerte, la meunerie française parvient plus ou moins facilement à couvrir ses besoins.
Pour l'exportation, la problématique est totalement différente car nos blés sont confrontés à des cahiers des charges qui, pour certains pays (notamment du Maghreb), sont gérés par l'Etat, ce qui les rend non discutables : il faut atteindre le seuil minimum pour être accepté.