« La facture des achats de tourteaux a beaucoup baissé depuis que nous engraissons nos taurillons avec une ration à base d'enrubannage de luzerne », lance Olivier Rimareix. En Gaec avec son frère Vincent et Arnaud Meunier à Puy-Malsignat, dans la Creuse, les associés ont mis quatre à cinq ans avant de généraliser cette ration à l'ensemble des lots à l'engraissement, mâles et femelles. Côté mâles, ils sont aujourd'hui 185 à suivre ce régime, dont 70 sont nés sur l'exploitation.
L'enrubanné est disposé dans l'auge à volonté. Les animaux reçoivent aussi des céréales de l'exploitation et un complémentaire azoté du commerce comprenant 25 % de protéines à raison de respectivement 4,5 kg et 1,5 kg en fin d'engraissement.
PESÉE DES CONCENTRÉS
L'idée de s'appuyer sur la légumineuse pour l'alimentation des bovins a germé dans l'esprit des trois associés dans les années 2000, alors que leur système d'engraissement était basé sur une ration sèche. « Nous l'avions mise en place sur les conseils des techniciens de notre coopérative Creuse Corrèze Berry Elevage en remplacement d'une ration à base d'ensilage de maïs », indique Olivier. Au niveau de l'organisation du travail, cette ration nous convenait davantage. »
Le seul problème de ce régime était les achats de complémentaire. Les associés supportent difficilement cette dépendance et cherchent à développer davantage d'autonomie. « J'avais lu qu'un hectare de luzerne produisait plus de protéines qu'un hectare de soja, signale Olivier. Je savais que cette légumineuse s'implantait facilement sur les terres de l'exploitation car mes parents en avaient déjà cultivé. »
A l'auge, les quantités de complémentaire augmentent petit à petit pendant la phase de transition et progressent jusqu'à la fin de l'engraissement. Au début, les associés se sont appuyés sur des pesées régulières des animaux pour vérifier que la croissance correspondait à l'objectif. « Aujourd'hui, nous ne le faisons plus, indique Olivier. En revanche, je pèse précisément tous les concentrés car, quelques grammes de trop sur le nombre d'animaux et sur l'année, cela représente un tonnage et un gaspillage important. »
100 G DE PDI /UF
La ration apporte en moyenne 7,4 UFV et 727 g de PDI. Elle couvre les besoins des taurillons limousins (500 kg), dont l'objectif de croissance est 1 200 g de GMQ. « 1 UF pour 100 g de PDI est la bonne proportion, souligne Matthieu Couffignal, de la ferme expérimentale d'Arvalis de Jeu-les-Bois, dans l'Indre. Inutile de distribuer plus comme certains le préconisent. »
Les associés ne visent pas la performance zootechnique à tout prix. Ils cherchent à trouver le bon compromis entre performances technique et économique et achats à l'extérieur limités. Sur le plan pratique, le concentré est distribué manuellement dans les auges des différents bâtiments à l'aide de la voiture utilitaire. « En réalité, au fil du temps, j'ai appris à ajuster la quantité de concentré à la qualité de l'enrubannage », ajoute Olivier. Celle-ci peut varier en fonction de la date de récolte, de la parcelle ou au sein d'une même parcelle.
Il arrive aussi qu'elle soit altérée à cause des corbeaux. Ils percent le film, ce qui nuit à la conservation du fourrage. « Nous avons observé que les oiseaux sont attirés par les petits escargots ou limaces qui se glissent sur les bâches », indique Matthieu Couffignal. Pour l'instant, la parade est difficile. L'installation de pièges à corbeaux limite les dégâts.
Olivier est en charge de la distribution de l'aliment mais la consigne est scrupuleusement notée sur un tableau, près de la bascule, pour le remplaçant.
L'approvisionnement en enrubannage s'effectue une fois par semaine, tandis que les concentrés sont distribués deux fois par jour. Pour éviter les risques d'acidose, l'animal doit consommer la céréale souvent et par petites doses. « Cela me permet de vérifier que tous les animaux viennent manger correctement, indique Olivier. Lorsqu'ils sont lents à venir à l'auge, j'estime que je leur en ai trop distribué lors du précédent repas. Je diminue donc la dose de 1 kg lors du repas suivant. »
VENTE EN BOUCHERIE
Au bout de dix ans, les associés ont enregistré peu de problèmes sanitaires lors de l'engraissement. Cela les a incités à faire l'impasse sur les vaccinations.
Les animaux sont vendus après 8 à 9 mois d'engraissemement en fonction de leur origine. Les carcasses pèsent environ 350 kg. « Leur couleur n'a pas varié par rapport à celles que nous produisions avec du blé et de la paille », indique-t-il.
Depuis le mois de mars dernier, une partie de ces jeunes bovins est vendue en boucherie. « Nous venons de racheter un magasin où nous écoulons un jeune mâle par semaine, indique Olivier. C'est un produit qui correspond à la demande du consommateur dont le pouvoir d'achat est en baisse. » Les commandes augmentent. Les associés viennent de signer des contrats d'approvisionnement avec des collectivités (maisons de retraite).
Dans l'immédiat, le Gaec a décidé d'augmenter le nombre de mères limousines pour être moins dépendant des achats de broutards.