Les bandes ultraflexibles IF (Increased Flexibility ou flexibilité augmentée) constituent l'innovation majeure de ces dernières années dans le domaine des pneumatiques agricoles. Certains annoncent des performances semblables à celles des chenilles, voire un effet moins dégradant sur le sol. Les protocoles de ces essais n'étant pas communiqués par les manufacturiers, nous avons décidé de comparer l'effet des pneumatiques IF et des chenilles en conditions réelles. Le comparatif a été mené en partenariat avec nos confrères de Boerderij (Pays-Bas) et avec le support technique du centre de recherche de Wageningen, de l'université de Vilentum (tous deux des Pays-Bas) et de l'université suédoise d'Uppsala. Le test a été mené dans les terres à betteraves des polders du nord des Pays-Bas.
Pour ce comparatif, nous ne prenons en compte que les effets sur le sol. Les avantages de l'une ou l'autre solution sur la consommation, les coûts de maintenance et l'entretien ne sont pas étudiés dans ce test.
MICHELIN ET ZUIDBERG
Vervaet a mis deux arracheuses de betteraves 617 à disposition pour l'essai. À l'avant, la première est montée sur chenilles Zuidberg, tandisque la seconde est équipée de pneumatiques Michelin Cerex-Bib IF 900/60 R 38. Les IF sont gonflés à 1,7 bar, conformément à la table de gonflage fournie par Michelin. Sur les deux machines concurrentes, l'essieu arrière est équipé de pneus radiaux classiques Michelin MegaXBib en 900/60 R 32. Il est important de préciser qu'il n'y a pas de pneus larges de 90 pouces disponibles avec la technologie Ultraflex IF. Ces pneumatiques sont gonflés à 1,3 bar même si, selon la table, ils devraient se situer à 2,1 bars pour une charge de 10,5 tonnes. Cette faible pression de pneus limite le tassement mais favorise la formation d'une plus large empreinte et augmente le risque de déchirure de la carcasse.
L'arracheuse à chenilles vide pèse près de 8 tonnes de plus que le modèle à pneus. Il y a plusieurs explications à cet écart. Tout d'abord, la version à chenilles est plus récente et affiche un poids sur la balance de 3 tonnes de plus, rien que pour la différence de technologie. Le support de chenilles contribue également à ajouter 1,5 tonne au poids total. Enfin, la boue présente dans la parcelle de test s'est accumulée dans la chenille, alors que les pneumatiques IF se sont autonettoyés. Les mesures ont été réalisées avec la trémie pleine.
L'arracheuse à chenilles vide pèse près de 8 tonnes de plus que le modèle à pneus. Il y a plusieurs explications à cet écart. Tout d'abord, la version à chenilles est plus récente et affiche un poids sur la balance de 3 tonnes de plus, rien que pour la différence de technologie. Le support de chenilles contribue également à ajouter 1,5 tonne au poids total. Enfin, la boue présente dans la parcelle de test s'est accumulée dans la chenille, alors que les pneumatiques IF se sont autonettoyés. Les mesures ont été réalisées avec la trémie pleine. La chenille Zuidberg a une superficie de 17 550 cm2, tandis que celle de la bande CerexBib est de 10 795 cm2. Les pneumatiques arrière laissent une empreinte de 10 410 cm2.
DES RÉSULTATS ÉLOQUENTS
La mesure de la pression au sol a été confiée à l'équipe de chercheurs de l'université d'Uppsala. Ils ont enterré des capteurs à 20 cm de profondeur. Les trois capteurs sont placés de telle sorte qu'il y en a toujours au moins un qui ne se trouve pas entre deux crampons. Les capteurs sont enterrés à un endroit où les betteraves ont déjà été arrachées, ce qui ne représente pas exactement les conditions réelles mais s'en approche.
En dépit de son poids plus élevé, la chenille est avantagée par sa surface de contact plus importante et offre une contrainte inférieure à celle du pneu. Le CerexBib a engendré une pression de 200 kPa à 20 cm de profondeur, contre seulement 140 kPa pour la chenille, soit 60 kPa de plus. Ce qui frappe surtout, c'est que, contre toute attente, la chenille ne se comporte pas comme un « plateau » et offre une courbe de tassement sensiblement équivalente à celle du pneumatique. Dans les deux cas, les roues arrière provoquent de petites pointes de charge de 170 kPa bien visibles. Un logiciel de modélisation estime ensuite la pression à différentes profondeurs, de 30 cm à 1 mètre. On constate alors qu'au-delà de 40 cm de profondeur, la différence de pression engendrée par la chenille et le pneumatique IF se réduit fortement. À 1 mètre, le matraquage est quasiment identique. Globalement, les chenilles provoquent moins de tassement sur le sol que les pneus IF.
Il restait à montrer l'influence sur la structure même de l'horizon et surtout à écarter l'hypothèse d'une mauvaise portance sur la parcelle. Des prélèvements de terre à 20, 30, 50 et 70 cm ont permis de mettre en évidence le taux d'argile de chaque horizon et d'évaluer ensuite l'effet du tassement. Ce test, mené uniquement avec les chenilles, montre qu'en dépit de la portance du sol, il est tassé sur tous les horizons.
Évaluer l'orniérage. Les étudiants de l'université de Vilentum ont réalisé le travail de fourmi consistant à parcourir les traces avec un pénétromètre et à mesurer les ornières. Pour les deux types d'équipement, l'orniérage a été évalué après un premier, un deuxième et un troisième passage. La profondeur des ornières est sensiblement équivalente avec les pneumatiques et les chenilles sur le premier et le second passage. En revanche, après trois passages, l'ornière est nettement plus importante avec les pneus.
Le pénétromètre, qui mesure la résistance à la pénétration et donc la compacité du sol, a permis de mettre en avant d'autres différences. Les mesures ont été effectuées dans les passages de roues et de chenilles, ainsi qu'entre les voies pour évaluer le matraquage sur toute la largeur de l'arracheuse. Dans une structure de sol normal, la pression mesurée au pénétromètre ne doit pas dépasser 1,5 MPa. Une valeur de 2,5 MPa, comme elle a été mesurée après deux passages, indique la formation d'un bloc compact équivalent à une semelle de labour. Il est frappant de constater que le tassement est plus important entre les passages de roues que dans les traces. Les ingénieurs de Vilentum et de Wageningen estiment que ce phénomène est dû à la formation d'un cône de résistance en profondeur au niveau des traces. Au centre de l'appareil, les deux cônes entrent en contact, ce qui crée une zone plus résistante à la pénétration. Les mesures n'ont pas montré de différences significatives au pénétromètre entre les pneus IF et les chenilles. L'explication avancée est le rôle joué à ce niveau par les roues arrière, qui sont les mêmes sur les deux arracheuses.
Un comparatif riche d'enseignements. Les tests ont permis de mettre en avant les points suivants :
À pleine charge, l'arracheuse équipée de chenilles tasse moins le sol que le modèle équipé de pneumatiques IF.
Néanmoins, le tassement provoqué par les chenilles est encore trop élevé et provoque un matraquage du sol.
Le pneumatique Ultra Flex IF a une plus large empreinte et une capacité de charge plus importante pour une pression plus faible qu'un pneumatique classique de taille équivalente.
La charge importante d'une arracheuse de betteraves nécessite une pression élevée de pneumatiques, ce qui diminue un peu l'avantage des IF.
Les pneumatiques arrière, de type radial classique, font perdre une partie des bénéfices apportés par les chenilles et les pneumatiques IF. Il reste donc encore une marge de manoeuvre importante pour réduire les effets des gros automoteurs sur le sol.