« Sur leurs exploitations, les lycées agricoles doivent former tout en restant productifs. La création d'un magasin remplit autant un objectif pédagogique qu'une stratégie de valorisation des produits », explique Jean-Claude Wagny, directeur d'exploitation au lycée de la Bretonnière, à Chailly-en-Brie (Seine-et-Marne).
Cet établissement, qui vendait déjà sa viande de mouton en caissettes, a décidé de « passer à la vitesse supérieure » en ouvrant sa propre boutique, Breto Saveurs, en janvier 2013.
Il y vend les plantes vertes et celles à repiquer que les élèves et apprentis produisent dans les serres, des sacs de blé et d'orge qu'ils conditionnent eux-mêmes, ainsi que des petits ballots de paille de 12 kg, « très prisés ».
Pour Maureen Machin (à gauche) et Mathilde Pampelune, en deuxième année de production animale, « discuter des produits fait désormais partie du métier d'agriculteur ».
Offrir une large gamme
Le lancement d'un atelier de volailles vient compléter le panel. Pas suffisamment toutefois : « Un point de vente à la ferme doit proposer une gamme de produits la plus large possible », explique Caroline Aubert, gérante du magasin et animatrice éducative.
Cette dernière a développé un partenariat avec une vingtaine d'autres lycées de France, pour « enrichir l'offre » : champagne de Crézancy, terrines de Basse-Normandie, produits cosmétiques de la Côte-d'Or, soupes des Ardennes…
L'identification « lycée agricole » est vite apparue comme un fort argument commercial. « Le fait que le produit ait été conçu en collaboration avec des jeunes est extrêmement porteur et déclenche souvent l'acte d'achat », constate l'animatrice.
Quant à la formation, « nous montrons à nos élèves que le métier d'agriculteur revêt de nombreuses facettes et que leurs perspectives d'emplois passent par l'adaptabilité et la multiplicité des compétences », souligne le directeur d'exploitation.
Les jeunes se relaient dans le magasin à l'occasion de leur stage sur l'exploitation. « Nous venons par équipe de deux ou trois le vendredi, jour d'ouverture, pour accueillir les clients et échanger avec eux », témoigne Maureen Machin, élève en seconde année de production animale.
Pour sa camarade de classe, Mathilde Pampelune, « discuter des produits fait partie du métier d'agriculteur. C'est agréable de pouvoir partager ses connaissances, son savoir-faire, faire connaître le métier et donner envie aux gens… »
La filière de vente du lycée s'implique aussi dans le projet, pour les opérations de communication ou de publicité dans les communes alentours. Avec succès : « Breto Saveur » compte désormais une clientèle fidèle, « jusqu'à Paris ! »
Alain Cardinaux
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Plus d'info sur le site du lycée : www.labretonniere.fr
Témoignage : CAROLINE AUBERT, gérante de la boutique « Breto Saveurs » et animatrice éducative
« Il faut faire vivre le magasin ! »
« Nous avons limité les investissements de départ car le local existait déjà, à côté des bureaux de l'exploitation du lycée. Il a tout de même fallu prévoir mon salaire et le rachat des produits, ainsi qu'un ordinateur pour la caisse.
Dans quelques mois, nous agrandirons le magasin. Il faudra alors faire des travaux pour abattre une cloison, mettre un faux plafond pour le chauffage… Nous prévoyons aussi l'achat d'un frigo, pour stocker les caissettes de viande sur place, et de nouvelles étagères.
Ces investissements sont nécessaires, car le magasin doit vivre ! Je change par exemple les produits de disposition toutes les deux ou trois semaines et dès que j'entre un nouveau produit ; comme en grande surface.
L'important est de ne laisser aucun vide. Et si les étagères sont trop fragiles pour supporter le stock de bouteilles, par exemple, je n'en mets qu'une seule rangée devant. »