Dans le département du Cantal, les trente-quatre techniciens du contrôle laitier ont pour mission de réaliser les plans d'accouplement chez leurs adhérents. Ils disposent pour cela d'un outil informatique développé en partenariat entre la coopérative d'insémination artificielle Coopelso et les contrôles laitiers du Sud-Ouest, qui sont utilisateurs de ce logiciel. Baptisé PAM (Plan Accouplement Micro), cet outil tient compte des objectifs de sélection que l'éleveur définit au préalable pour son troupeau. «C'est là son intérêt majeur, précise Philippe Riol, animateur au contrôle laitier du Cantal. Avant d'en disposer, les plans d'accouplement réalisés sur un support papier attribuaient les taureaux en fonction de leurs index ainsi que des qualités et défauts de chaque laitière. Une méthode plus orientée vers le phénotype de chaque vache que vers la construction génétique du troupeau. Le logiciel offre davantage de rigueur dans le suivi d'un objectif de sélection. L'exercice était plus difficile manuellement, avec des risques de déviations pour s'adapter à certaines vaches.» L'informatique gère aussi les risques de consanguinité et l'écueil des gènes récessifs dont la prise en compte tenait parfois du casse-tête. Il procure également un gain de temps très appréciable pour les techniciens, notamment dans les grands troupeaux.
Le logiciel PAM s'ouvre sur l'écran destiné à cibler correctement l'objectif de sélection de l'éleveur. Son technicien et lui disposent pour cela d'un rappel des index moyens du troupeau. Il s'agit ici de choisir trois critères, dont un synthétique (Isu ou Inel) ainsi que deux critères élémentaires (TP, lait, membres, morphologie, taille, etc.) et de leur accorder à chacun un pourcentage (20% au minimum pour l'Isu ou l'Inel). Les vaches sont ensuite classées par ordre décroissant en fonction de cet objectif.
Un outil de terrain
Si le troupeau est adhérent à l'Upra, les index sont intégrés; s'il n'est pas inscrit, ce sont les index des parents qui entrent en ligne de compte. Pour chaque vache, une fiche pointe automatiquement les trois postes à améliorer. S'il le souhaite, l'éleveur peut alors préciser ou modifier cet objectif individuel. «L'informatisation du plan d'accouplement ne se substitue pas à l'observation des animaux. Cela reste un outil de terrain. Il faut préciser aussi que tous les contrôleurs laitiers du département assistent à la traite un mois sur deux. Ils sont donc capables de discuter avec l'éleveur des qualités et des défauts de chaque vache», précise Philippe Riol.
Les taureaux disponibles sont également classés en fonction de l'objectif de départ. A partir d'un fichier fourni par la coopérative d'insémination, le logiciel gère les doses attribuées à chaque éleveur en fonction de l'effort de testage et, éventuellement, les doses achetées à l'extérieur. Les propositions d'accouplement peuvent alors commencer. Pour chaque vache, PAM va choisir les trois taureaux censés corriger au mieux les défauts de l'animal. Il reste alors à vérifier la concordance de ce choix avec une observation plus détaillée. On peut, par exemple, examiner dans le détail les index morphologiques et ceux de la mamelle.
L'éleveur garde la main
Il est toujours possible de consulter les autres taureaux disponibles et de constater pourquoi le logiciel ne les a pas choisis: coefficient de parenté trop élevé, risque de vêlage difficile pour les génisses ou stock de doses épuisé. «A tout moment, l'éleveur garde la main. Ainsi, les passionnés de génétique peuvent affiner leur choix ou modifier un ou plusieurs critères. A l'inverse, le logiciel offre une grande sécurité et un confort aux éventuels novices en génétique. Il n'est plus nécessaire d'étudier parfaitement les index des taureaux pour réaliser un plan d'accouplement cohérent. Quand on connaît le coût de l'élevage d'une génisse, il est important de ne pas se tromper à ce stade», rappelle Philippe Riol. Le logiciel gère également les retours d'IA et le pourcentage des doses de testage qui peuvent être affectées automatiquement aux premières lactation par exemple. Les accouplements terminés, le bilan génétique du troupeau s'affiche. Il permet de vérifier si l'objectif de départ est atteint, notamment sur les produits à naître. «Ce logiciel nous a particulièrement aidé à travailler le taux protéique dans les troupeaux cantaliens. C'est un service compris dans la cotisation et disponible pour tous les adhérents au contrôle laitier. Il fait aujourd'hui l'unanimité», conclut Philippe Riol. Le logiciel PAM est à ce jour commercialisable et utilisable partout en France.
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Témoignage: GÉRARD BUCHON, Gaec Buchon, à Andelat, dans le Cantal (1)
«Les propositions de taureaux sont toujours cohérentes»
Le Gaec Buchon souhaite insister sur l'Isu, la capacité et la mamelle. Le logiciel lui permet d'éviter les erreurs.
Le Gaec Buchon adhère au Contrôle laitier depuis 1997. Les 55 vaches montbéliardes sont suivies par le technicien Olivier Delair, qui utilise le logiciel PAM depuis plusieurs années. Passionné de génétique, il connaît bien les vaches de ses adhérents et reconnaît qu'il a souvent son idée sur l'accouplement qui leur correspond. «Cependant, nous ne pourrions plus nous passer de cet outil. C'est plus rapide, il ne se trompe pas et on peut toujours affiner le choix.» Au Gaec Buchon, les trois objectifs de départ sont l'Isu (50%), la mamelle (30%) et la capacité (20%). Explication des éleveurs: «L'Isu nous garantit une amélioration sur les aptitudes fonctionnelles et la production laitière. Nous avons déjà un bon niveau en TP et le prix du gramme supplémentaire ne justifie pas d'accentuer le trait. Nous sommes plus attachés aux qualités de la mamelle en liaison avec les cellules ainsi que pour nos sorties sur les concours. Enfin, nous tenons à préserver la valeur bouchère que nous espérons maintenir en jouant sur la capacité.»
Redon exclu sur le coefficient de parenté
Les premiers taureaux qui correspondent à leurs choix sont, dans l'ordre: Redon, Pernan, Ojoli, Plumitif, Nikos, etc. Si on prend l'exemple d'une vache, Tunisie (Lecuyer/Faucon), le logiciel pointe trois défauts majeurs: le développement de la mamelle (96), le TP (-0,1) et la profondeur de poitrine (94). Il lui attribue donc trois taureaux: Redon, Plumitif et Ojoli, dans l'ordre. Après vérification des index détaillés de la mamelle, des aplombs et des fonctionnels, l'éleveur confirme le choix de Redon. Certes, Pernan aurait pu être un taureau intéressant mais son coefficient de parenté l'a exclu. Les accouplements terminés, PAM dresse le bilan génétique. Sur les taureaux utilisés, il est de +700 kg en lait, 116 en capacité et 114 en mamelle. L'objectif est respecté. Même constat sur les index des produits à naître.
«Pour nous, ce logiciel est très cohérent dans ses propositions. Il permet d'aller plus rapidement à l'essentiel et d'éviter les erreurs grossières», assurent les éleveurs.
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(1) L'exploitation: 116 ha tout en herbe, 331.000 litres de quota, 55 montbéliardes, 7.100 kg/VL, 34,7 de TP.