«Le calcul de la fertilisation azotée des prairies repose sur une adaptation de la méthode des bilans, bien connue des céréaliers, explique Alain Besnard, ingénieur à la station expérimentale de la Jaillière (Arvalis). Elle vaut pour les graminées pures et les associations contenant moins de 50% de légumineuses. A la différence des cultures annuelles, les prairies sont exploitées plusieurs fois dans l'année, selon des modes (pâturage, fauche...) et des rythmes différents.»

 

Dans ce contexte, la dose d'engrais minéral à apporter tient compte des exportations de la prairie, des fournitures du sol, de la contribution des légumineuses et des restitutions par les animaux au pâturage, sans oublier la fumure organique à base des fumiers et lisiers (voir la formule de calcul sur la photo). «L'une des difficultés tient à l'estimation du potentiel de la prairie, souligne Alain Besnard. Les connaissances de l'éleveur et celles des techniciens locaux aident à l'apprécier. Dans le cas contraire, il peut être approché grâce à des références diffusées par les chambres d'agriculture et Arvalis, qui prennent en compte le mode d'exploitation et la situation pédoclimatique.»

A titre d'exemple, dans les Pays de la Loire, dans le cas d'un excès d'eau hivernal important avec une faible pousse estivale, une prairie pâturée ou coupée en foin ne produira que 4 t/ha de MS. Elle passera à 7 t/ha avec une forte pousse estivale. Quant aux exportations d'azote par tonne de MS, elles varient de 15 unités pour un foin tardif à 25 unités pour un pâturage et un ensilage, et 30 unités pour un pâturage intensif.

Utiliser le référentiel

Grâce aux références acquises ces dernières années, les fournitures du sol (minéralisation, arrière-effets des apports organiques) ont pu être précisées dans quelques régions. En sols maigres des Pays de la Loire, elles s'échelonnent de 40 u/ha pour de faibles retours organiques à 80 unités avec des épandages fréquents et une dominante de pâture. En sols profonds, ces valeurs sont respectivement de 100 et 150 u/ha et, dans les autres cas, de 70 et 120 u/ha. Ces valeurs peuvent diminuer de 20 à 50 u/ha en sols très humides. «En dessous d'une proportion visuelle de 10 à 20% de légumineuses au printemps, la prairie doit être fertilisée comme une graminée pure, note Alain Besnard. Mais à 40%, la contribution du trèfle devient conséquente et, selon le rendement de la prairie, celle-ci peut varier de 55 à 95 u/ha.»

L'effet des rejets animaux est directement lié à la part de la pâture dans la production annuelle. Ces restitutions varient de 25 à 40 u/ha pour 75% de pâture, à 10-20 u/ha pour moins de 50%.

Enfin, l'azote épandu n'est jamais totalement efficace. Selon les essais menés par Arvalis, le CAU annuel peut être estimé à 0,7. Quant à l'azote issu de la fertilisation organique, son coefficient d'équivalence en engrais l'année de l'apport varie selon le type de produit et l'époque d'épandage. Pour un fumier de bovin apporté à l'automne, Arvalis l'estime à 0,15, contre 0,60 pour un lisier de porc épandu au printemps.

 

Risques de pertes

Des pertes d'azote nitrique sous prairies pâturées deviennent significatives pour des apports supérieurs à 250 u/ha. Il est possible de les réduire en évitant les épandages au-delà du début de juin en zone à déficit hydrique prononcé, au maximum à la fin de juillet en région arrosée.

 

 

Premier apport précoce

Deux raisons militent en faveur d'un premier apport précoce: la production d'herbe a lieu majoritairement au printemps et la contribution des légumineuses reste tardive. Selon Arvalis, les éleveurs peuvent épandre l'engrais dès que la somme des températures moyenne en base 0°C atteint 200 degrés jours à partir du 1er janvier. Bien entendu, en zone vulnérable, il faut tenir compte des périodes d'interdiction et de la portance des sols. Selon le mode d'exploitation, la dose totale est répartie en deux ou trois passages.