Il fallait être né dans ce coin de l'Allier consacré aux vaches allaitantes charolaises pour s'y installer. A l'écart des grands axes, le village de Meillard avait vu fondre sa population de 400 à 280 habitants entre 1970 et 1989. Et les maisons laissées à l'abandon décourageaient les jeunes de rester. «En 1989, notre équipe a remplacé les communistes, qui tenaient la mairie depuis 1919», rappelle Yves Simon, le maire actuel. Les deux épiceries et les deux cafés étaient fermés. Seules subsistaient les tournées du boulanger, du boucher et du poissonnier. L'école était menacée de passer en classe unique. Aussitôt élu, Yves Simon s'attache d'abord avec trois communes voisines à organiser un regroupement pédagogique éclaté. «Nous voulions maintenir trois écoles avec un partage de classe et un partage de certaines activités: classe de découverte, informatique.» Yves Simon le sait: les jeunes couples qui visitent les maisons s'inquiètent en premier lieu de l'existence d'une école dans le village. «Quand nous nous sommes présentés aux élections, nous nous étions dit que nous ouvririons dès que possible une auberge. L'auberge a une connotation rurale, sympathique, gourmande. En 1992, malgré l'endettement de la commune, l'équipe municipale s'est lancée. L'Etat nous a suivis. Nous avons transformé l'ancienne école de garçons au coeur du village à deux pas de l'église.» Pour recruter leur premier aubergiste, ils font appel à Canal+ et à Martine Mauléon.
L'Auberge gourmande a connu plusieurs gérants avant de séduire le couple actuel, qui la tient depuis neuf ans. Aujourd'hui, elle bénéficie d'une fourchette au Guide Michelin et attire une clientèle qui vient de cinquante kilomètres à la ronde. «L'auberge fournit les repas de la cantine. Cela leur génère un chiffre d'affaires de 120 euros les jours d'école.» Les vingt-huit enfants de CE1 et de CE2 de Meillard se rendent tous les midis au foyer des jeunes, juste en face de l'auberge. «Nous avons supprimé le poste de cantinier. Le repas, qui coûtait 10 euros à la commune, revient désormais à 2 euros.»
La renaissance du bourg de Meillard est passée par la réhabilitation des logements délaissés. «Depuis 1994, le syndicat intercommunal d'aménagement et de développement, qui réunissait dix communes, puis la nouvelle communauté de communes "Bocage sud" de quatorze communes ont généré 15 millions d'euros d'investissement, souligne le maire de Meillard, également président de la communauté de communes. Dix commerces ont été créés. Depuis 1989, nous avons réalisé 4,5 millions d'euros d'investissements à Meillard sans augmenter les taux d'imposition. Nous avons donné la priorité à la rénovation de l'habitat privé et social. Nous avons désormais sept logements sociaux destinés en priorité aux jeunes couples et aux personnes de plus de 65 ans. En 2006, les loyers des logements et de l'auberge ont rapporté 30.000 euros au budget communal, sans compter les taxes d'habitation, la dotation de l'Etat en fonction du nombre d'habitants et le maintien des effectifs dans les écoles. Nous nous intéressons actuellement à trois bâtiments dégradés que l'initiative privée délaisse. Depuis quinze ans, 48% de la population a changé.»
Autre attrait de la commune, le centre d'élevage de l'Allier, créé en 1997, accueille des expositions d'animaux et se transforme en salle de spectacle ou en amphithéâtre. Il est également doté d'une salle de banquet. Entre aménagement des voies, fleurissement des places et restauration de l'église, Meillard s'est transformé. Pour le plaisir des habitants mais aussi des touristes, qui peuvent désormais trouver sur place dix-sept gîtes ruraux et sept chambres d'hôtes.