1 - Quelles sont les perspectives du métier d'agriculteur?

Madame Fischer Boel annonce le programme, les agriculteurs doivent se préparer à prendre un travail à mi-temps! Les Etats-Unis, à travers l'OMC, imposent suppression des aides et des barrières douanières, libéralisation totale du marché, et donc alignement des prix sur les cours mondiaux. La Commission européenne signe la fin de l'agriculture dans notre pays! Qui pourrait accepter cela?

La rupture avec l'Union européenne est la seule issue pour assurer un avenir à notre agriculture: c'est le sens de ma candidature.

2 - OMC: L'Europe doit-elle encore faire des concessions pour parvenir à un accord? Comptez-vous vous opposer à un accord qui léserait les intérêts agricoles français et comment?

Au sein de l'OMC, de recul en recul, les représentants de l'UE n'ont cessé de s'incliner devant la volonté des Etats-Unis. Non seulement il faut s'opposer à tout accord, mais il faut rompre avec ces organismes (OMC, UE, Pac…), qui ne prennent de décisions que contre l'intérêt des peuples du monde entier.

3 - Faut-il encore une Pac après 2013? Certains trouvent que le budget de la Pac devrait être redéployé vers la recherche et l'éducation, êtes-vous de ceux-là?

Pendant des années, les paysans ont manifesté au cri de «ni Pac, ni Gatt». On voit le résultat des différentes Pac aujourd'hui: notre agriculture est en ruine. C'est tout de suite qu'il faut rompre avec l'UE dont est issue la Pac, pour sauver notre agriculture, en finir avec la libéralisation des pratiques commerciales. Rester à l'intérieur de l'UE, cela signifie la privatisation de l'éducation et de la recherche; le processus est déjà largement entamé. On demande à la recherche, comme aux universités, d'établir des partenariats avec le privé, ce qui ne peut conduire qu'à la fin de l'indépendance de la recherche et de l'enseignement pour les orienter vers l'objectif de profits immédiats.

4 - En 2008, l'examen à mi-parcours de la Pac doit-il se cantonner à un bilan de santé, évoluer vers une redistribution des aides ou se transformer en une réforme encore plus profonde?

En 2008 comme en 2007, nous n'avons rien de bon à attendre de la Pac. Chaque année, les friches gagnent du terrain (100.000 ha / an), les agriculteurs disparaissent (environ 500.000 aujourd'hui, et bientôt 200.000). La commissaire européenne veut faire arracher 400.000 ha de vigne en cinq ans, et c'est évidemment le Languedoc-Roussillon qui est visé pour l'essentiel. Le revenu des agriculteurs n'a cessé de chuter, les obligeant à cesser leur activité ou à s'agrandir pour survivre. Le bilan est apocalyptique, Il est grand temps de mettre un terme à cette politique de destruction sciemment organisée.

5 - Faut-il développer les biocarburants industriels?

Une étude scientifique sérieuse doit être menée, pour savoir si le bilan énergétique final des biocarburants est positif. S'il est positif, il faut évidemment les développer.

6 - Etes-vous favorable au développement des bioénergies en circuit court? Dans les faits et au-delà des discours, on observe depuis de nombreuses années que beaucoup de «bâtons ont été mis dans les roues» de ces microfilières de proximité (tracasseries administratives, paperasserie et fiscalité dissuasives, tarif de rachat de l'électricité insuffisant). Vous engagez-vous à ce que le double langage cesse?

(*) biogaz, huile végétales pures, chaudières polycombustibles, etc.

Hélas oui! Des bâtons ont été mis dans les roues des microfilières de proximité. Tous les secteurs de l'énergie, privatisés en application des directives européennes, doivent être re-nationalisés (pétrole, gaz, électricité…) afin d'établir un contrôle honnête, indépendant, sur l'utilisation ou le développement de telle ou telle énergie. Pourquoi des tracasseries administratives? Pour préserver des intérêts privés! Il faut lever tous ces obstacles pour une utilisation rationnelle des bioénergies, particulièrement en circuit court.

7 - Jusqu'où doit aller la prise en compte de l'environnement? Croyez-vous par exemple à une agriculture sans pesticides?

Quand il y avait 2,5 millions d'agriculteurs en France, on ne se posait même pas la question de la protection de l'environnement. Les choses se sont dégradées avec la marche à l'industrialisation de l'agriculture, avec la disparition des haies, le développement des cultures intensives et l'utilisation de produits phytosanitaires dangereux. Aujourd'hui, et après toutes ces évolutions souvent négatives, la Commission européenne prend prétexte tout à fait hypocritement de la protection de la nature pour arriver à ses fins, dictées par l'OMC. Bush l'a dit, et le fait mettre en application par l'OMC: l'Europe doit être réservée au tourisme, donc dehors les paysans! Natura 2000, le développement des parcs naturels, l'introduction du loup et de l'ours, tout cela contribue à transformer les paysans en jardiniers de la nature en attendant de les chasser de leurs terres. On voit là qu'une bonne cause (la protection de l'environnement) peut cacher des objectifs purement économiques.

On doit tendre à une agriculture sans pesticides, sans herbicides. Ce ne peut être qu'un but que la recherche scientifique devrait nous aider à atteindre. Dans l'immédiat, s'en priver serait réduire dramatiquement la production agricole.

8 - L'agriculture est-elle d'abord faite pour produire?

Le premier rôle de l'agriculteur est de produire pour nourrir la population. Il est à craindre que si on lui enlève cette fonction l'humanité connaisse de graves problèmes d'alimentation. Les paysans ne sont pas des paysagistes destinés à entretenir la nature pour le plaisir des touristes; il y a là une grave perversion de leur utilité sociale.

9 - La France doit-elle cultiver des OGM?

Seule la recherche scientifique libre et indépendante dotée des moyens nécessaires, et donc sous contrôle de l'Etat, et non pas des grands groupes industriels de l'agroalimentaire ou des produits phytosanitaires, peut nous dire si les OGM présentent un danger ou n'en présentent pas. On ne doit pas avoir d'a priori sur les OGM; l'expérimentation seule peut nous dire ce qu'il en est réellement, et le commun des mortels est incapable de donner une réponse à cette question, sauf à sombrer dans l'idéologie.

10 - Que comptez-vous faire pour abaisser les charges pesant sur les exploitations agricoles?

Les difficultés des agriculteurs ne proviennent pas d'un excès de charges, mais du fait que leurs produits leur sont payés en dessous du prix de revient. C'est l'OMC, la Pac, la déréglementation imposée par l'UE, qui ont abouti à ce résultat. L'agroalimentaire, la grande distribution ont été les grands bénéficiaires de cette politique qui a ruiné la plupart des paysans. Les agriculteurs ont bien compris d'où venait le mal, puisqu'ils ont voté «NON» à la Constitution européenne. Baisser les charges ne servirait à rien, sauf à enrichir encore la grande distribution. Une seule exigence: les agriculteurs veulent vivre de leur travail, et pour cela leurs produits doivent être payés ce qu'ils valent.

11 - Etes-vous favorable à une TVA sociale en agriculture?

Pour les raisons développées ci-dessus, une TVA sociale agricole n'apporterait aucune solution et ne servirait qu'à ponctionner encore plus le monde du travail, et il n'a pas besoin de cela.

12 - Que comptez-vous faire pour maintenir les services publics en milieu rural et développer la couverture des campagnes par les moyens modernes de communication?

Peut-on tolérer que des enfants en bas âge prennent le car de très bonne heure, rentrent tard le soir, parce qu'il y a eu un regroupement d'écoles? Peut-on tolérer que des femmes soient obligées de faire 100 km pour accoucher, parce que la maternité de proximité a été fermée? Peut-on tolérer que le facteur, seul lien parfois avec l'extérieur pour des personnes âgées isolées, ne passe plus dans nos campagnes, laissant ceux-ci à l'abandon, parce que ce service ne serait pas «rentable» selon les critères de la libre concurrence avec les opérateurs privés? En application des directives européennes, les services publics disparaissent les uns après les autres de nos communes rurales: DDE, EDF, perceptions, bureaux de poste, écoles… Une seule issue à tout cela: abrogation des directives européennes, renationalisation de tout ce qui a été privatisé. Il faut d'urgence rouvrir nos bureaux de poste de plein exercice, rouvrir nos écoles communales, ramener au village nos DDE, nos perceptions, et redonner aux maires leurs prérogatives. Il faut abroger les lois sur l'intercommunalité forcée (Voynet, Chevènement…) et revenir à nos syndicats intercommunaux librement consentis.

13 - Que proposez-vous pour enrayer le grignotage des terres agricoles?

Enrayer le grignotage des terres agricoles, c'est aussi mettre un terme à la spéculation. Il faut revenir au POS géré par nos mairies, il faut encadrer par la loi le prix des terrains à bâtir et développer les lotissements communaux de manière à baisser le coût de l'habitat et permettre à tout le monde d'y accéder. Il est intolérable que nos meilleures terres agricoles soient transformées en golfs ou en parcs de loisirs. Tout cela ne peut se faire dans le cadre de l'UE qui, au nom de la «concurrence libre et non faussée», ouvre la voie à la spéculation.

14 - Faut-il revaloriser les retraites agricoles et si oui comment?

Les retraites agricoles sont dramatiquement basses. Tout est lié, les prix à la production sont tellement bas que les agriculteurs sont bien en peine de payer leurs cotisations à la MSA, leurs cotisations de retraite. Ce sont des milliards d'euros pris cette année sur les revenus des producteurs pour enrichir la grande distribution. Les moyens de payer des retraites décentes (au moins le Smic) existent. Il faut les restituer aux producteurs. Pour cela, le gouvernement doit prendre la décision de fixer des prix agricoles rémunérateurs et en contrôler l'application. Tout cela est évidemment contraire au traité de Maastricht qui ne tolère pas la moindre entente sur les prix, laissant les mains libres aux multinationales de l'agroalimentaire pour imposer des prix toujours à la baisse.