L’histoire

Florian, éleveur, avait pris à bail auprès de Martial, un vaste bâtiment à usage d’étable pour y abriter ses vaches. Après quelques années, Florian avait constaté un affaissement de la charpente. Craignant une aggravation, il avait alors sollicité et obtenu du juge des référés la désignation d’un expert.

Le contentieux

Au vu du rapport de l’homme de l’art, Florian avait saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail et en indemnisation de son préjudice.

Il avait fondé sa demande sur l’article 1719 du code civil. Le bailleur est obligé par la nature du contrat de délivrer au preneur la chose louée conformément à l’usage prévu par le bail. Ainsi, l’obligation de délivrance consacrée par ce texte impose au bailleur de permettre au fermier d’exploiter les lieux conformément à leur destination. Et selon la jurisprudence, lorsque le bailleur ne remplit pas son obligation de délivrance, le preneur peut demander la résiliation du bail.

L’expert judiciaire avait conclu que l’origine du désordre provenait d’un sous-dimensionnement de la charpente qui avait fléchi jusqu’à occasionner la rupture des entraits. Autant dire que l’étable était affectée d’un défaut structurel majeur caractérisant l’existence d’un manquement de Martial à son obligation de délivrance, ce qui justifiait la résiliation du bail à ses torts selon Florian.

Martial s’était pourtant défendu en invoquant un argument pertinent. Il n’était pas établi que le désordre affectant la charpente de l’étable existait antérieurement à la conclusion du bail, alors en outre que, n’étant pas sur place, il n’avait pas la possibilité d’en constater la réalité. Et il avait ajouté qu’au vu de l’expertise, il avait proposé à Florian d’effectuer des travaux, mais ce dernier n’avait donné aucune suite à la proposition. Aussi, Martial n’avait-il rien à se reprocher.

"Le preneur avait constaté un affaissement de la charpente de l’étable."

Et il avait obtenu gain de cause. Les juges avaient posé en principe que sans préjudice de l’obligation continue d’entretien de la chose louée, les vices apparus au cours du bail et que le preneur était, par suite des circonstances, seul à même de constater, ne sauraient engager la responsabilité du bailleur que si informé de leur survenance, celui-ci n’a pris aucune disposition pour y remédier. Or, pour les juges, il n’était pas établi que le désordre affectant la charpente existait antérieurement à la conclusion du bail.

En outre, averti depuis plusieurs années d’une difficulté liée à l’état de la charpente, Florian n’en avait informé Martial que très tardivement. Aussi, Martial n’avait-il pas manqué à son obligation de délivrance pendant l’exécution du bail. Et la Cour de cassation n’a pu que confirmer cette décision.

L’épilogue

Le bail ne sera pas résilié, et des travaux devront être entrepris. Mais il ne s’agira plus de l’obligation de délivrance mais bien de celle d’entretien concernant les grosses réparations visées aux articles L. 415-3 du code rural et 1720 du code civil, qui sont à la charge du bailleur.