« Je ne reviendrai pas en arrière », déclare Séverine Van Hasselaar, éleveuse de chèvres dans l’Indre en évoquant l’ébourgeonnage des chevreaux sous sédation. À la tête d’un troupeau de 400 saanen, l’éleveuse écorne environ 120 chevrettes par an. Pour elle, la prise en charge de la douleur était un enjeu important. « Quand on écorne, on est bien conscient : ce n’est pas agréable pour l'animal », reconnaît l’agricultrice. Il s'agit aussi de gagner en confort de travail. « Auparavant j’ébourgeonnais 5 ou 6 chevreaux par cession et c’était fatigant. Il faut y mettre de la force, supporter les cris… Avec la sédation, et je peux faire des cessions de 10 ou 15 chevreaux ». Travailler sur des animaux endormis permet aussi d’améliorer les chances de réussite de l’opération. « Cette année, je n’ai eu qu’une chevrette de ratée » explique l’éleveuse, qui estime son taux de réussite à 70 % avant de pratiquer sédation.

Une injection intramusculaire

La sédation par l'éleveur ne peut se faire qu'avec l'accord du vétérinaire. Son accompagnement lors des premières séances d'ébourgeonnage est obligatoire dans le cadre de la prescription. La sédation s’effectue via une injection intramusculaire, un geste que les éleveurs sont généralement habitués à pratiquer. Avant l’injection, il convient de peser quelques animaux pour évaluer les doses à administrer. Utiliser des aiguilles à usage unique, ou encore vérifier que les animaux sont en bon état de forme fait également partie des recommandations des vétérinaires. L’ébourgeonnage est possible une dizaine de minutes après avoir effectué l’injection. Les chevreaux se réveillent dans les deux heures suivant l’intervention. Si la sédation permet de prendre en charge la douleur liée aux lésions des tissus, l’administration d’anti-inflammatoire après l’écornage permet de gérer l’inconfort lié à l’inflammation. « Je leur donne un produit contre la douleur au réveil, et désinfecte les bourgeons avec une bombe rafraîchissante », explique Séverine.

Il peut être déroutant de travailler sur un animal endormi. « C'est assez impressionnant au début, mais c’est plus facile, en particulier pour la contention », confie l’éleveuse, d'abord surprise de travailler sur des « animaux mous ». Pour l’écornage, elle positionne ses chevreaux sur une botte de paille afin de les tenir à hauteur, avant de les remettre dans un enclos surpaillé pour l’occasion afin qu’ils ne prennent pas froid.

Séverine pratique l’ébourgeonnage sous sédation depuis 2020. La première année, elle a bénéficié des conseils de son vétérinaire, « c’est très rassurant », admet l’éleveuse, soucieuse d’apprendre les bons gestes et consciente que l’utilisation de ces produits n’est pas anodine. La sédation à l’écornage revient à un peu moins de 2 € par animal. Un coût certes, mais qui lui permet de « travailler dans de meilleures conditions ».