Si l’on a le choix, vaut-il mieux produire du lait avec plus de maïs ou d’herbe pâturée ? Les équipes (1) affiliées à la station expérimentale de Trévarez, située dans le Finistère, ont mis en place un protocole hors norme pour répondre à cette question.
Installation en double système
Entre 2010 et 2017, deux lots d’une soixantaine de vaches laitières (VL) ont été conduits en simultané : un lot axé maïs avec une accessibilité réduite au pâturage (15 ares/VL), et un lot herbe avec 40 ares/VL ainsi qu’une part importante d’ensilage d’herbe et de maïs l’hiver. L’ensemble des vaches disposait d’un correcteur azoté (tourteau de soja), pour garantir un rapport PDI/UFL de 95 g, et d’un concentré de production en début de lactation. L’élevage des génisses et des taries est resté commun.
L’installation de ce double système s’est faite entre 2010 et 2012. Les résultats extraits de l’étude présentée le 23 avril dernier se basent sur les données recueillies « en croisière » entre 2013 et 2017. Sur le terrain, l’autonomie protéique a dépassé 80 % dans le lot herbe, avec 135 jours par an sans correction azotée. Seulement 91 g de concentrés par litre de lait vendu ont été utilisés, et le silo de maïs est resté fermé en moyenne 70 jours sur la belle saison. Cette autonomie a été estimée à 65 % pour le lot maïs : 35 jours sans correction azotée, 118 g de concentrés consommés par litre vendu et silo ouvert toute l’année.
Davantage de lait avec le maïs
Concernant la productivité des vaches, la balance penche en faveur du lot maïs. Les vaches en faisant partie ont produit 554 kg de lait en plus par an que leurs consœurs. Les taux étaient également meilleurs : + 0,6 g/kg pour le TP et + 0,8 g/kg pour le TB en moyenne. Mais si l’on considère le lait vendu et non plus celui produit, l’écart de production se réduit à + 384 kg/VL/an, toujours en faveur du lot maïs. L’explication est simple. Les chercheurs ont recensé 22 troubles de la santé entraînant un traitement curatif supplémentaire pour 100 lactations dans le lot maïs (surtout des mammites et boiteries). Ceci est « lié au temps de présence en bâtiment », explique Élodie Tranvoiz, de la chambre d’agriculture de Bretagne. En revanche, aucun impact du régime n’a été relevé sur les performances de reproduction ou l’état corporel.
La simulation des performances économiques donne un net avantage au système herbe. « Le prix du lait est similaire pour les deux lots mais l’écart entre le lait produit et le lait vendu pèse dans le résultat final », relève Valérie Brocard, de l’Institut de l’élevage. Le coût alimentaire est inférieur de 21 €/1 000 l et la marge sur coût alimentaire (MCA) est supérieure de 19 €/1 000 l vendus dans le système herbe. Le revenu disponible sur l’atelier lait y est supérieur de 24 €/1 000 l vendus. « Le prix du lait et des intrants varie chaque année, mais la MCA et le revenu sont toujours plus élevés dans le lot herbe. Ce qui en fait un modèle plus résilient », appuie la spécialiste. Les résultats obtenus sur le lot maïs sont probants. « Si l’accessibilité manque pour développer le pâturage, il est possible d’optimiser un système 15 ares/VL. L’essentiel est de prioriser la production de lait par les fourrages », conclut Pascal Le Cœur, de la chambre d’agriculture de Bretagne.
A. Courty
(1) Issues de l’Institut de l’élevage et de la chambre d’agriculture de Bretagne.
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