« Au sein des grandes cultures, la betterave sucrière présente un bilan carbone plutôt favorable. Mais les moyens existent pour encore l’améliorer », souligne Rémy Duval, responsable adjoint du département technique et scientifique de l’ITB (1). Au cours de la campagne culturale, différents postes contribuent aux émissions de gaz à effet de serre (GES) vers l’atmosphère, notamment sous forme de N2O. En premier lieu, la fertilisation azotée minérale. Cette dernière émet 1374 kg éq CO2/ha selon des estimations réalisées par l’ITB dans le cadre d’un itinéraire standard (dose de 100 unités d’azote minéral). Ces émissions peuvent intervenir directement au champ, mais aussi par volatilisation ammoniacale et par lixiviation. Elles sont aussi liées à la fabrication de l’engrais.

L'azote contenu dans les résidus végétaux (feuilles de betteraves, résidus du couvert d'interculture précédent) émet aussi des GES, à hauteur de 533 kg éq CO2/ha. La fertilisation organique (vinasses) contribue de façon plus modeste aux émissions (275 kg éq CO2/ha), tout comme la consommation de carburant (397 kg éq CO2/ha). Attention toutefois au moment de la récolte, période où on consomme beaucoup de carburant et où on peut créer des tassements. Ces derniers favorisent les effets de saturation en eau en surface, ce qui augmente les émissions de N20.

Stockage dans le sol

Le total de ces émissions de GES (2578 kg éq CO2/ha) est contrebalancé par un apport ou la restitution de matière organique au sol. « Les feuilles de betteraves et les résidus du couvert sont de bons producteurs de carbone stable, à hauteur de 2263 kg CO2 par ha », détaille Rémy Duval. Toutefois, le bilan vrai doit tenir compte d'un déstockage continu du carbone du sol par minéralisation de l'humus (3769 kg éq CO2/ha). Le bilan à l'échelle de la campagne culturale est ainsi "émetteur" et on est donc assez loin de la neutralité carbone. 

Pour améliorer ce bilan, « il est possible de faire des choses assez simples sans bouleverser l’itinéraire technique, en jouant notamment sur les modalités de fertilisation azotée», assure Rémy Duval. Il est ainsi conseillé de choisir des formes d’azote minéral les moins émettrices en passant d’une solution azotée à de l’ammonitrate. « On peut même aller plus loin en associant un retardateur de nitrification », précise-t-il. Autre possibilité : l’enfouissement localisé de l’azote au semis afin de limiter la volatilisation et de diminuer la dose. « A chaque fois qu’on va réduire les doses d’engrais minéral, on va être gagnant », insiste Rémy Duval.

Substituer une partie de la fertilisation minérale par de l’azote organique est un autre levier. Cela permet de réduire les émissions de GES mais surtout de favoriser le stockage de carbone dans le sol. Ainsi 3 924 kg éq CO2/ha peuvent être stockés grâce à 20 t de fumier de bovin par exemple (lire encadré). Réduire la fertilisation minérale de la culture principale est possible grâce à l’interculture, en implantant des couverts riches en azote (association légumineuses et crucifères par exemple). « Il est aussi possible de limiter le travail du sol mais ce levier a un assez faible effet sur la réduction des émissions si on ne va pas plus loin dans la recombinaison des systèmes de culture », juge Rémy Duval.

(1) Institut technique de la betterave.